Au printemps joli
Les oiseaux font cui-cui
Sous l’arbre
Je paresse à regarder la vie
Ça devait être des mots mignons
Que je ramenais à l’institutrice
Celle qui me lisait et me corrigeait
Mes poèmes dans la classe
Poète
C’est toujours un peu la classe du cancre
Je n’ais pas beaucoup de souvenir
Et tous ces mots affreux pour designer
Les étapes de l’école ; cp,cm1,cm2
Je n’ai jamais rien compris
Qu’on enferme ainsi l’enfance dans ses mots tordus
Ma dyslexie
Mon incroyable étourderie
L’intérêt pour les fenêtres
J’ai encore dans les tripes
Ces heures pleines de biscuits et de marrons
De nos mornes rentrées
De la craie mordant le tableau
De la panique sur l’estrade
L’odeur des petits pots de colle
Avec leurs petites pelles
Les grumeaux
Les récitations
La pluie sur les vitres
La lumière à quatre heures
Le cafard où s’englue l’après midi
Un temps qu’on croit éternellement prisonnier
Les marges entourées d’eternels zeros rouges
Je n’étais pas grande
Je prenais déjà trop de place
La place des derniers
C’est nulle part
Dans l’éther
Je n’ai cultivé que m’on absence
Mon art de voyager en fusée
Sans fusée
Au printemps joli
Les oiseaux font cui-cui
Sous l’arbre
Je paresse à regarder la vie
Trois fois « flûte »
Je voulais écrire ces mots au premier jour du printemps
Mais vous savez
Le petit travail de vendeuse en colifichet
La machine à linge à remplir
La machine a vaisselle à vider
Le Jambon purée pour faire rapide
Le film du soir
J’ai foiré le printemps
Finalement c’est comme habitude
Je fais appelle à l’heureuse nature de ma maniaco dépression
J’ignore s’il faut être malade pour créer
Mais je sais que le temps se vole
Pour ce que l’humanité malade juge inutile
Bipolaire ce n’est pas drôle
Sauf le temps qu’on arrache à l’entourage
A coup de pâmoison
Pour dire ses mots.
Au printemps joli
Les oiseaux font cui-cui
Sous l’arbre
Je paresse à regarder la vie
Je suis né dans une jolie ville
Pas très loin de paris
Mais longtemps oubliée
Et c’était bien.
Aujourd’hui, nos jardins sont plein de jacinthes et de narcisses
D’arbres roses
D’arbres blancs
De mésange et de rouge gorges
Ma ville est un joli gâteau que mettent à sac les promoteurs
Au printemps joli
Je rêve de jolie révolution
Ou la beauté, le calme, le silence
La sérénité
ne serait plus l’otage
De tous ce fric
Dans l’air
Les premières abeilles
Qu’on applaudit bien fort
Pour leurs efforts à nous survivre
Dans l’air les premières abeilles
Font tourner l’oreille du chat
Dans une quinzaine de jour je vais avoir 50 ans
Autant les prendre au printemps
Je me souviens encore de ma maitresse
On dirait que le temps
Ne me délivre toujours pas
De mon enfance
Au printemps joli
Les oiseaux font cui-cui
Sous l’arbre
Je paresse à regarder la vie
L’enfance a confisqué ma raison d’adulte
Ce n’est pas plus mal