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Djevelen Roi des posts ? Oui, ça me va
Nombre de messages : 1281 Age : 22 Localisation : Dans les vapes... Loisirs : Etre ici, tout simplement. Date d'inscription : 30/08/2016
| Sujet: Otaku Lun 2 Jan 2017 - 18:15 | |
| C'est encore moi! Bien, cette fois-ci, on se retrouve pour mon texte sur ce hacker et, oui Mentalius, la romance entre deux hommes ! Je vous promets que je vais essayer de faire ça moins anarchiquement que la dernière fois ! Sur ce, en espérant que je le finirais, c'est parti !Otaku - Chapitre 1 :
Agmar longeait les couloirs du lycée, se fondant dans l'ombre des murs. Les gens ne le regardaient pas, ne le voyaient pas. Il avait l’habitude et c’était mieux pour lui. Le jeune homme marchait droit devant lui, rapidement, silencieusement. Il ne voulait en aucun cas s’attarder trop longtemps au même endroit, de peur qu’un lycéen ne le remarque. A dix-sept ans, il en faisait quatorze. Il n’était pas très grand, mais d’une maigreur effrayante. Des cheveux mi-longs, couleur cendre, s’éparpillaient sur son front et sur son crâne hanté de pensées toutes plus noires les unes que les autres. Il avait des yeux marron foncé tranchant totalement avec sa peau blanche à en faire frémir un cadavre. Agmar aurait esquissé un sourire s’il avait pu entendre ces quatre mots. Faire frémir un cadavre. Statistiquement, faire bouger un mort était chose impossible, de son plein gré du moins… Mais tout ce qui était impossible attirait Agmar comme s’il eut été un aimant avide de savoir. Cette faculté rendait ce qu’il appelait son « fléau » visible de tous. Le jeune homme était surdoué. Cette différence, d’habitude si dérisoire, combinée à sa légère agoraphobie et son insociabilité aigue le rendait peureux et incapable de la moindre sympathie. En classe, il y avait trop de bruit, trop d’agitation. Il se sentait nauséeux, la tête sur le point d’exploser. Tout rapport humain lui était extrêmement difficile car il lui demandait énormément d’énergie et, de l'énergie, Agmar en avait peu. Effectivement, il passait ses nuits à regarder des animes ou à lire des mangas et de larges cernes soulignaient ainsi constamment ses yeux. Un otaku. Il était un otaku. C’était le seul refuge qu’il avait réussi à trouver pour supporter cette agitation perpétuelle qui l’entourait. Mais cela aurait pu être supportable si les gens s’étaient contentés de croiser sa route et de détourner le regard pour ne pas voir ce déchet de surdoué, ce fragile de geek, comme ils se plaisaient à l’appeler, ou cette pédale ambulante ! Malheureusement, comme dans tous les lycées qui se respectent, les crétins étaient légion. Une pléthore de ces incapables s’amusait à le tourmenter dès qu’ils se voyaient. Agmar en avait plus qu’assez. Mais enfin, qu’est-ce que cela pouvait bien leur faire que ses grandes mains osseuses et blafardes soient faites pour taper à toute vitesse sur un clavier d'ordinateur ? Qu’est-ce qu’ils en avaient à carrer que son cerveau soit une pointure en maths ? Et puis, bordel ! Etait-ce leur problème qu’il se contente parfois de trois heures de sommeil ? Enviaient-ils son corps de lâche, comme ils disaient ? Non, putain ! Alors pourquoi est-ce qu’ils tenaient à tout prix à le faire chier ?! A force, Agmar ne supportait plus rien. Les cours l’ennuyaient et ces gens qui l’entouraient le répugnaient. Il avait horreur de leurs langues perfides, de leurs discussions acerbes et enfantines, de leurs messe-basses et de leurs railleries !
Agmar grogna, puis reprit son chemin. Il passa par une multitude de couloirs qui sentaient fort la sueur avant de pousser deux grandes portes de verre qui marquaient l’entrée du lycée. Il grimaça. A peine sorti que, déjà, le soleil le transperçait douloureusement et mordait ses rétines si sensibles à la lumière. Tempêtant contre les éléments, le jeune homme finit par s'habituer quelque peu à cette vive lueur. Son sac sur le dos et une main en visière, Agmar prit le chemin de chez lui, impatient de rentrer. Mais le soleil l’accablait trop et l’endurance n’étant pas son fort, il peinait à chaque pas. Lorsqu’il parvint enfin au bas de son immeuble, il se rendit compte qu’il avait mis dix minutes de plus qu’à l’accoutumé. Il soupira avant de dépenser le peu d’énergie qu’il lui restait dans l’escalade des quatre étages jusqu’à son palier. Une fois devant la porte, il inséra ses clefs dans la serrure. La porte claqua, il était rentré. Dix-sept heures quarante trois, personne à la maison, normal. Il soupira avant de se diriger d’un pas traînant jusqu’à la salle de bain. L’ombre soudaine de l’immeuble l’avait endormie, le protégeant des vifs rayons sournois qui semblaient pouvoir s’insinuer partout. Les mains moites, il retira son T-shirt Batman qui lui collait à la peau.
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| | | Djevelen Roi des posts ? Oui, ça me va
Nombre de messages : 1281 Age : 22 Localisation : Dans les vapes... Loisirs : Etre ici, tout simplement. Date d'inscription : 30/08/2016
| Sujet: Re: Otaku Ven 6 Jan 2017 - 17:24 | |
| - Chapitre 2 :
L’eau coulait sur son corps depuis deux minutes environ. Il était bien. Elle enveloppait lentement tout son être de sa chaleur bienfaitrice et le faisait doucement oublier dans quel pétrin il se fourrait chaque jour. Agmar était un solitaire, ce qu’avaient d’ailleurs l’air de lui reprocher tous les gens autour de lui. Enfin, c’est ce que supposait le jeune homme… Sinon, à quoi bon venir le faire suer lorsqu’il déjeunait seul à la cantine ? Et, pourquoi même sa mère s’y mettait en faisant le plus d’apparitions possibles dans sa chambre quand il était enfin tranquille ? Sa mère… Il passa une main sur ses yeux et augmenta le débit de l’eau, ainsi que la chaleur, en tournant rageusement le robinet. Parfois, lorsqu’ils étaient à table et qu’elle lui sortait ses phrases à la con entendues chez une de ses amies bourgeoises, il avait envie de lui hurler dessus ! Pour elle, il n’avait pas d’identité, si ce n’est : Le surdoué à sa maman ! Il se remémorait avec rage les soirées pendant lesquelles ils recevaient des invités. Sa mère se faisait toujours une joie de rappeler à quel point son fils était exceptionnel à force de compliments qui lui faisaient plus mal qu'autre chose. De ses "Vous savez, mon fils est un garçon charmant, bourré de talents aussi nombreux que ses amis... Oui, oui... Bien sûr... Et figurez-vous que notre adorable Agmar est surdoué, oui, oui ! Ce n'est pas n'importe qui qui pourrait calculer aussi vite que notre petit trésor, ah ça non !", il en avait plus qu'assez. Elle en faisait un jouet juste bon à amuser la galerie ! Même un singe en cage devait être plus heureux que lui ! Il fulminait. Il n'était pas un de ces aristocrates coincés du cul ayant bien trop peur des autres pour leurs cracher à la gueule leurs quatre vérités. Néanmoins, il est vrai que le jeune homme crachait rarement leurs "quatre vérités" à ses agresseurs, aussi nombreux soient-ils. Lorsqu’il leur faisait face, certes, il était impressionné par autant de crétinerie, figé de peur d'être en présence d'autres êtres humains, absolument pas suicidaire au point de provoquer trois grosses brutes en chaleur, mais, surtout, il jugeait ses dépenses d'énergie trop importantes si il commençait à s'énerver et n'était pas certain d'en avoir assez pour tenir jusqu'à la fin de la journée. Alors, Agmar se taisait et se contentait de recevoir injures comme coups.
Il fini par couper l’eau et sorti de sa douche quelques instants plus tard. Enveloppé d’un peignoir, il se dirigea vers sa chambre à pas lents. La chambre d'Agmar était tout ce qu'il y avait de plus lugubre et sombre. Les volets étaient toujours légèrement entrouverts et diffusaient une très faible lumière dans la pièce. Il régnait une odeur rance et additive ainsi qu'une impression de total dépourvu. Des posters à l’effigie de personnages de mangas comme Shanks, L ou encore Hikaru, recouvraient entièrement les murs et des figurines reposaient sur les nombreuses étagères qui y étaient accrochées. En entrant dans cette pièce, ce fut comme si toutes les injures et tous les défauts qu’on lui avait balancés à la gueule disparaissaient de sa tête. Que son corps en était lavé. Il soupira d'aise avant d'aller jusqu'à son placard et d'y saisir un jogging, un T-shirt noir et un sweat gris. Il les enfila, tira la capuche sur sa tête, et s'installa sur son fauteuil à roulettes. Il tapa son code et l'écran d'accueil s'afficha. Agmar jubila. Qu'est-ce que cela faisait du bien de se connecter après une journée de merde comme celle qu'il avait passée ! Il continua d'une main la tablette de chocolat qu'il n'avait pas terminée la veille tout en démarrant l’épisode quatorze de shokugeki no soma. Il aimait bien cette série. Alors qu’il avait du mal avec les mangas de cuisines qu’il trouvait étranges, celui-ci était assez épatant. L’auteur avait un don indéniable pour faire passer les émotions des personnages à travers leurs yeux.
Le temps passa sans qu’il ne s’en rende compte tant il était plongé dans les épisodes, mais une porte claquant le ramena à la réalité. Son pouls s’accéléra. Un léger cliquetis retentit dans l’entrée. Des chaussures à talons. Sa mère. « Et merde ! soupira le jeune homme. » Il était déjà vingt-deux heures ; il allait être forcé de dîner avec elle. « Chéri ? » Stridente. C’était tout ce qu’il venait à l’esprit d’Agmar pour décrire la voix de sa mère. D’ailleurs, il aurait pu utiliser cet adjectif pour la décrire toute entière… Elle cherchait sans arrêt à se faire voir par ses remarques incessantes et ses fringues outrageantes. Elle avait trente-sept ans, mais elle s’habillait encore comme une pute ! Agmar serra les poings et les mâchoires, à tel point que ses oreilles crissèrent. Cette femme le répugnait… « Chéri ? persista-t-elle devant ce silence cérémonieux. » Pas question qu’il réponde. Pas à elle. Elle était sa mère, et pourtant, Agmar en était dégoûté. Sa perpétuelle odeur parfumée lui donnait des nausées et, dès qu’elle s’approchait trop près, la tête lui tournait. Ses senteurs lui montaient au cerveau et ses froufrous lui chatouillaient le nez, provoquant des séries d’éternuements des plus désagréables mais, par-dessus tout, Agmar ne supportait pas son contact. Sa chair rose et lustrée au contact de son corps osseux provoquait chez lui des suées terribles dont il mettait plusieurs heures à se remettre. Malheureusement, sa génitrice aimait particulièrement le serrer contre lui dès qu’elle le voyait, au grand dam de son mari qui la trouvait bien trop possessive. Rudolph Steinlitz, banquier, était un homme hautain aux humeurs difficiles. Issu de l’ancienne noblesse allemande et d’une famille à la fortune conséquente, Rudolph était dur, froid et antipathique. Il revenait chaque soir plus sévère que le précédent et l’appartement s’emplissait de son humeur massacrante. Il était grand, rachitique et toujours vêtu d’un costume trois pièces impeccablement repassé et ajusté. Jamais un seul de ses cheveux ne dépassait de sa coupe méticuleusement tracée à l’équerre et aucun poil de barbe ne venait perturber son menton en pointe. Ses traits fins et droits ainsi que ses petits yeux accentuaient cet effet de terreur sourde qui vous saisissait le corps dès qu’il vous jaugeait de son regard froid et sans âme. Agmar n’avait aucun contact avec son père. Dès qu’il croisait son regard, tout dégoût pour sa mère disparu, son agoraphobie refaisait surface en provoquant une compression de sa cage thoracique qui bloquait sa respiration, des palpitations, des fourmillements, mais surtout, une terreur immense lui enserrait le cœur d’une poigne de fer, pressant l’organe de façon croissante. Rien que d’y penser, le cœur d’Agmar s’était mis à battre plus fort et ses yeux se fermait bien plus rapidement qu’à l’accoutumé. Trois coups furent frappés à sa porte, le reconcentrant sur la réalité. Il mis l’épisode au pause. La poignée s’abaissa et sa mère passa sa tête par l’encablure. « Enfin chéri, réponds-moi quand je t’appelle !... murmura-t-elle en affichant une mine boudeuse. » Agmar ne répondit pas, fixant ses traits délicats gâchés par un tas de peinture immonde qui lui donnait envie de gerber. Des anglaises blondes –dont elle était très fière- tombaient harmonieusement autour de son visage d’un rose chimique. « Et puis ouvre-moi ces volets, mon chou ! marmonna-t-elle de nouveau en répétant sa moue. Tu vas étouffer à rester dans tout ce noir, choupi ! -C’est impossible… grinça l’adolescent. -Hum… ? Qu’est-ce qui est impossible, mon poussin ? » Elle avait déjà détourné les yeux, fixant les volets d’un air criminel. Agmar soupira. « Maman, on ne peut pas s’étouffer avec le noir. Ce n’est que le résultat d’un manque de lumière naturelle ou artificielle. » Sa mère le fixa avec hébétude avant de sourire bêtement. « Mais comment fais-tu pour être aussi intelligent ? Tu devrais t’investir plus dans ta classe, mon lapin… Ton père et moi souhaiterions que… -C’est bon ! la coupa l’adolescent. Allons manger… » Il avait réussi à arrêter sa mère, mais il devait maintenant dîner avec elle… Youpi !... La soirée s’annonçait longue… Très longue !
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| Sujet: Re: Otaku Mer 8 Fév 2017 - 19:51 | |
| Pour ceux qui auraient déjà commencé, j'ai changé le personnage principal. Au lieu d'être un Hacker, Agmar est désormais un otaku (fan de manga) ! - Chapitre 3 :
Chapitre 3 : L’enfer
Seul le bruit des couverts contre les assiettes résonnait dans l’appartement. Parfois, la mère d’Agmar toussotait et tentait d’entamer une conversation avec son fils, mais ce dernier, lorsqu’il répondait, se contentait d’un vague grognement, coupant ainsi court à toute tentative. Agmar avait les yeux dans le vide. Il s’efforçait de ne pas regarder sa mère qui ne savait toujours pas manger proprement à son âge. En effet, Marie Speinlitz n’avait jamais saisi les rudiments de cet apprentissage du maintien des couverts et continuait de s’étaler de la sauce sur le visage. Mais, comme tout ce qu’elle faisait, elle le faisait délicatement, ce qui renforçait son image de femme facile, stupide, mais très mignonne. Tout ce qui plaisait aux hommes fortunés que Rudolf Speinlitz côtoyait… Néanmoins, bien qu’elle ait eu une multitude d’avances, parfois même en présence de son fils, Marie restait totalement fidèle à son époux. Mais… c’était sûrement la chose la plus bête qu’elle n’ait jamais faite car, contrairement à elle, Rudolf avait l’habitude de se… changer les idées. C’était d’ailleurs à peine s’il touchait encore sa femme lorsqu’il rentrait après un voyage d’affaire ayant duré plusieurs semaines. Agmar piqua mollement une coquille saint jacques. En réalité, il en avait un peu marre de toujours manger des mets de luxes et n’aurait pas dit non à un bon hamburger plein de sauce et de fromage coulant. Même un plat de pâtes carbonara, peu importe, mais quelque chose de gras ! Ces légumes et ces assortiments d’une bouchée maximum le gonflaient sérieusement. Perdu dans ses pensées, il ne remarqua pas la soudaine pâleur qui s’était installée sur le visage de sa voisine de table, ni son silence prolongé. Ce n’est que quand il entendit des pas dans le vestibule qu’il tiqua. Sa respiration s’accéléra ; il était là. Rudolph Speinlitz. « Bonsoir, chéri ! babilla Marie, mal à l’aise. Tout s’est bien passé au bureau ? » Froissement de col. Il avait hoché la tête. « Ah… ! Ta part est dans le four, je vais la chercher ! s’écria se femme en se levant précipitamment. -Pas la peine, assieds-toi. » Grave, profonde, puissante. Sa voix était belle, indiscutablement. Une voix de stentor qui charmait les femmes et faisait trembler les puissants. Dans un passé lointain, Agmar avait aimé cette voix. Mais plus maintenant. Elle ne représentait plus qu’une peur intense, une douleur sourde. Il enfourna discrètement sa bouchée et se redressa imperceptiblement sur sa chaise. Ensuite, il observa le drôle de ballet qui se jouait devant lui. Sa mère regardait de tous côtés, cherchant tout ce qu’elle pouvait faire pour se rendre utile à son mari rentrant d’une dure journée de labeur. Il esquissa un sourire. En cet instant, avec ses cheveux volants dans tous les sens, cette expression d’égarement et cette lueur bien réelle dans les yeux, elle paraissait presque humaine… Rudolph passa derrière lui et alla s’asseoir entre sa mère et lui, en bout de table. Toujours en costard, il surplombait sa famille d’une bonne tête et une aura noire se dégageait de tout son être. Effrayant. Deux bonnes minutes passèrent dans un silence gêné, exagéré, avant que Rudolph Speinlitz ne se décide enfin à lever la tête vers son fils. « Et l’école ? commença-t-il. Comment ça c’est passé ? » Agmar joua avec sa nourriture du bout de sa fourchette. « Comme d’habitude… » Sa voix était faible, sans émotions. Il avait appris depuis bien longtemps à ne plus rien laisser paraître devant son père. Il ne voulait pas lui laisser le loisir d’accéder à ses sentiments et, surtout, il ne voulait pas qu’il sache qu’il avait plus peur de lui que de tout autre chose. « D’habitude, d’habitude… grommela Rudolph. Tu me dis ça à chaque fois, Agmar ! Je ne sais même pas ce que tu entends par « habitude » ! » Son fils délaissa sa pitance et tourna la tête vers son père, excédé. « L’habitude, selon le Larousse, est une manière de faire, un comportement créé chez quelqu’un par une action répétée. Voudrais-tu un autre sens ? Où plus de détails, peut-être ? -AGMAR ! » Il se raidit. Son père avait abattu son poing sur la table avec une rudesse peu commune qui avait fait vibrer la vaisselle et trembler Marie. Rudolph fixait son fils avec une intensité sourde et ce dernier sentit ses entrailles se nouer. « J’en ai plus qu’assez de ton impertinence ! clama-t-il d’une voix vibrante de rage. Cela ne te suffit pas de manger à ma table ? Tu me dois bien plus de respect que cela jeune homme ! » La vision d’Agmar s’obscurcissait en périphérie et son cœur battait la chamade. Ça n’allait pas du tout. Pas du tout. « Tu sais très bien ce que je veux dire, fils ! Ta mère et moi en avons assez de tes manières ! Tu devrais être digne et ne pas te laisser marcher dessus ! Tu devrais montrer ton intelligence à tous au lieu de rester assis à ne rien faire ! -Je suis agoraphobe, tenta-t-il d’une petite voix. -COMMENT ? hurla son père. Si tu as quelque chose à dire, dis-le plus fort, bon dieu ! Et arrêtes de te cacher derrière une stupide maladie mentale ! Agmar, écoute-moi bien, cracha-t-il. Ce sont les fous qui en ont, pas nous. Pas toi ! » Il se pinça l’arrête du nez avant d’esquisser un geste de la main. « Va-t-en, maintenant… » Il ne se fit pas prier deux fois et s’aida de la table pour se relever. Il chancela légèrement et se mordit la lèvre avant de se diriger vers sa chambre. Il enchaînait les pas sans vraiment s’en apercevoir. Une seule pensée tournait en boucle dans sa tête : Fuir. Fuir très loin. Fuir cet homme et ses principes, fuir cette atmosphère si lourde qu’elle pesait sur son être, fuir cette famille de tarés qui lui coupait et les ailes et le souffle et, par-dessus tout, fuir cette vie dont il ne voulait plus. Arrivé dans le couloir, il se rua tant bien que mal dans la salle de bain et se jeta sur la cuvette avant de régurgiter son dîner. Nouvelle brûlure. Amère. Putain, il en avait marre ! Il n’en pouvait plus de ses parents froids et distants ! Il le savait depuis des années, qu’il ne pourrait jamais rien en tirer. Il le savait…
Mais alors, pourquoi pleurait-il ?
Dernière édition par Djevelen le Sam 4 Nov 2017 - 15:55, édité 1 fois | |
| | | Djevelen Roi des posts ? Oui, ça me va
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| Sujet: Re: Otaku Mar 14 Fév 2017 - 16:45 | |
| J'avoue que je suis un peu moins fière de la qualité de ce chapitre, mais il était essentiel donc... Bon, bonne lecture !!! Chapitre 4 : Ecole - Partie 1 :
Agmar écoutait distraitement son prof de français parler d’Emile Zola, selon lui la quintessence de l’écriture et de l’art français, tout en fixant bien plus passionnément le dessin sur sa feuille. Il avait réussi à reproduire plutôt fidèlement un saitama sur son cahier et il en était assez fier. Il gribouillait encore la cape quand la sonnerie retentit, mettant fin à l’incessant bruit de stylos sur le papier, et tous les élèves se levèrent d’un coup, délaissant immédiatement les explications de monsieur Réan. Agmar rangea lentement ses feuilles, heureux d’avoir enfin terminé les cours. Il se leva sans précipitation avant de se diriger vers le couloir encore bondé et attendit un petit instant que le taux d’élèves présents ait nettement diminué avant de se jeter dans la mêlée. La sortie du lycée était toujours un moment difficile pour lui. En effet, il se collait à une multitude de corps étrangers qui n’avaient aucune considération pour lui et respirait leur odeur pratiquement à même leur peau. Aujourd’hui, néanmoins, le couloir était moins encombré et l’on pouvait circuler facilement sans être emporté par la foule, surtout avec un corps aussi malingre que le sien. Agmar se dirigea donc vers la sortie en pensant à l’animé de Bakuman qu’il avait eu envie de revoir en griffonnant son héros chauve durant le cours précédent. Il arriva bien vite à l’étage du dessous et se dirigea vers l’escalier le moins utilisé, bien que cela lui fasse faire un détour. Il n’y avait déjà plus qu’une dizaine de personnes dans cette partie de l’établissement et c’est plus soulagé qu’il continua son chemin. Malheureusement, la chance, encore une fois, le délaissa. Une main s’abattit sur son épaule et il se retrouva entraîné dans une salle de classe toujours ouverte. « Ben alors mec, on cherche son chemin ? » Trois grosses brutes l’encerclaient. Ils avaient tous trois des joggings d’une matière synthétique et un survêtement en toile. Ils le fixaient d’un air arrogant et Agmar cligna furieusement des yeux tout en déglutissant. Les trois gaillards étaient dans sa classe. Baptiste, Amin et Lucas. Lucas le maintenait contre le mur d’un bras contre sa poitrine qui l’empêchait de respirer pleinement. Une goutte de sueur coula sur son front. Malgré son affolement, Agmar ne put se retenir de penser que tous ces évènements faisaient très « clichés » films américains et il esquissa un pâle sourire. « Ça t’fait rire, tafiole ? cracha Amin en lui jetant un regard noir. C’est ton t-shirt de meuf qui t’fais marrer ? » Ils éclatèrent tous de rire tandis que le pauvre adolescent baissait les yeux vers le dit t-shirt. Comment ça « de meuf » ? Akame ? C’était un monstre, oui ! Néanmoins, il n’en menait pas large. Il savait que seuls eux décidaient de la marche à suivre. Il n’était absolument pas en mesure de changer le cours des choses qui ne manqueraient pas d’arriver et se taire paraissait donc la meilleure des solutions. « Bon écoute mon p’tit gars, on ne t’veut pas mal, tu sais ça, hein ? chuchota Lucas. » Son visage couvert d’acné surplombait celui d’Agmar et son odeur trop forte de déodorant lui montait au nez en brûlant ses sinus. « Nous, tout ce qu’on veut, c’est t’aider, pas vrai les gars ? » Ses amis hochèrent la tête en rigolant comme jamais tandis qu’Agmar le regardait sans comprendre. Sa respiration s’accélérait et il sentait chacune de ses veines palpiter davantage. Il balbutia : « Que… quoi ? -C’est très simple, Agmar… Nous, on veut juste te dire… » Ses paupières s’ouvraient et se fermaient à un rythme bien trop élevé et de la sueur apparaissait un peu partout sur son corps. Ses mains poisseuses enserraient sa veste alors que Lucas collait sa bouche rêche contre son oreille et susurrait : «…Qu’ici, c’est notre terrain, ok ? Sale PD ! » Et son poing vola dans le ventre d’Agmar. Ce dernier ouvrit grands les yeux et sa respiration se bloqua. Il hoqueta de stupeur et ne put que s’appuyer davantage contre le mur derrière lui afin de ne pas s’écrouler au sol. Il ne faisait plus la différence entre leurs rires vicieux, le bourdonnement incessant qui vrillait ses tympans et la douleur dans son ventre. Il eut chaud, il eut froid, il eut mal. Il regardait les yeux globuleux de Lucas sans vraiment les distinguer de cette aura de démence qui émanait de son corps. L’espace n’était plus l’espace et le temps perdait de sa vitesse. Agmar réussit à prendre une bouffée d’air et s’en abreuva comme si il eut été un marin perdu en mer. Devant lui, ses agresseurs continuaient de l’insulter et de le frapper, mais il ne les entendait plus. Des points noirs obscurcirent sa vision et il se sentit perdre pied. Il ne ressentait plus rien. Rien qu’un étouffement palpable, une solitude ravageuse et un sentiment qu’il ne sut alors reconnaître. Et il s’effondra. Il n’était pas évanouit, seulement, ses membres ne le portaient plus. Tout son corps était agité de légers spasmes et il se sentait incapable du moindre mouvement quelque peu complexe. D’abord surpris, les trois énergumènes finirent par éclater de rire en hurlant des insultes grivoises. Ces paroles parvenaient sous forme de bourdonnement douloureux à Agmar et sa tête était sur le point d’exploser. Dans ce flou constant, cette impression d’être immergé dans des eaux troubles, l’adolescent n’entendit pas la porte s’ouvrir à la volée, ni les trois compères se taire d’un coup. Seul le léger tintement de ce soudain silence se frayait un passage jusqu’à ses tympans. Agmar ne prit conscience qu’une chose étrange étant en train de se passer que lorsqu’il en discerna le mouvement, droit devant lui, entre les brumes compliquées érigées par son cerveau embrumé. Il releva lentement la tête, dénouant tous ses muscles et tous ses nerfs un par un en un mouvement saccadé, avant de fixer le nouveau venu. D’abord, il ne vit qu’une tignasse brune savamment éparpillée en touffes et épis brillants à la lumière des néons. Etonné et curieux, Agmar se concentra sur cet être venu de nulle part et sa vision retrouva son acuité tout aussi vite qu’elle ne l’avait perdue. C’était un grand gaillard vêtu de baskets noires, d’un pantalon de toile marron et d’un sweat sombre. Son visage halé était transpercé par deux puits d’un brun foncé tacheté de noir et sa bouche légèrement entrouverte laissait échapper une respiration hachée et précipitée. Il avait courut. Agmar se détendit et sa respiration se calma. Il avait des traits si simples et si délicats à la fois que c’en était déroutant. L’arête de son nez possédait une petite bosse et ses joues étaient légèrement rouges à cause de sa course. Il avait une main sur la clenche et s’était arrêté au beau milieu de son mouvement, abasourdi. Sûrement ne s’attendait-il pas à tomber sur pareille scène… « Euh… commença-t-il, hésitant. » Sa voix grave était rauque sans pour autant paraître agressive. Les agresseurs d’Agmar se fixèrent, étonnés. « Désolé de vous déranger ! reprit le jeune homme en passant une main derrière sa tête tout en arborant un sourire contrit. J’avais oublié ma trousse au dernier cours alors je suis revenu en vitesse ! » Voyant que sa déclaration ne suscitait aucune réaction chez les personnes qui lui faisaient face, il commença à marcher jusqu’à l’endroit où il avait laissé sa trousse tout en ajoutant : « Allez-y, allez-y, continuez j’vous prie ! » Silence. Comment ? Qu’avait-il dit ? « Continuez j’vous prie » ? Agmar ouvrit grands les yeux. Qui était-il ? Etait-il bête au point de croire que tous ici présents n’étaient que des amis qui s’amusaient normalement ? Il n’en revenait pas… D’ailleurs, les trois compères non plus, car ils eurent tôt fait de déguerpir, laissant le pauvre Agmar seul avec cet étrange personnage. Le jeune homme se tassa contre le mur et respira un bon coup. Ne pas s’affoler. Surtout, ne pas s’affoler. Ses mains se tordaient rapidement et ses yeux passaient d’un point à un autre sans discontinuer. Il était stressé. Cela faisait beaucoup trop d’évènements pour son organisme et son esprit troublé en une seule soirée. Beaucoup trop ! « Hé ! Hé ! » Il sursauta. Devant lui se tenait l’étranger. Il s’était penché vers lui tout en restant à une certaine distance et il le fixait de ses mystérieux yeux marrons. « Ça va ? s’enquit-il. » Hein ? Comment ça : « Ça va » ? Il était sérieux ? Agmar se contenta de le fixer d’un air ébahi, attendant la suite. « Ohé ! répéta l’inconnu. Ça va, oui ou non ? -Mais… euh.. » Agmar pesta. Sa voix était rauque, étouffée, hachée… Il s’en voulait de paraître si faible face à cet étranger. Il reprit tout de même, perplexe : « Tu… me demandes si ça va ?! Alors que tu viens de leur dire de continuer ? Tu n’as pas du tout conscience de ce qu’il se passait ? -Prends-moi pour un imbécile, grommela l’autre. ‘Chuis pas con, tu sais ? J’ai bien compris qu’entre vous tous, ce n’étais pas l’amour fou ! » L’adolescent ricana. « C’est pour ça que tu n’as rien fait… -Non mais attends mon gars ! Je ne te connais pas ! s’offusqua-t-il. -Et alors ? s’énerva Agmar. -Et alors je ne suis pas un héros, mon p’tit pote ! Je ne vais pas prendre le risque de me faire tabasser pour sauver quelqu’un que je ne connais absolument pas ! » Sa voix avait gagnée en intensité pendant qu’Agmar l’observait avec animosité. Les deux se jaugèrent un moment, puis, bizarrement, l’étranger sourit et l’atmosphère se détendit. « … ‘Scuse-moi, soupira le jeune homme en passant une main dans ses courts cheveux bruns… Mais, j’ai déjà un bon nombre de bavures sur mon dossier, si tu vois c’que j’veux dire… Alors… Ce n’était vraiment pas le moment de me rebeller encore une fois. Pardon mon pote. » Agmar resta un bon moment à le fixer sans rien dire. Ce gars était vraiment très surprenant. Il avouait sans fards qu’il l’avait laissé tomber pour une bonne cause : la sienne ! De plus, il s’excusait ensuite ?! Agmar sourit avant de pouffer juste assez pour que l’autre relève la tête et le regarde droit dans les yeux sans bien comprendre ce soudain changement d’ambiance. « C’est… c’est quoi ton nom ? murmura Agmar. -Mon nom ? s’étonna le jeune homme. » Il avait l’air de ne pas y croire. Cependant, devant l’air franc qu’affichait l’être chétif qui lui faisait face, il se décida enfin à lui répondre. « Euh… J’m’appelle Nathan. Nathan Habib. » Son nom, prononcé à l’orientale, fit sourire Agmar. Même si ce mec n’en avait pas conscience, c’était bel et bien son sauveur. « Et toi ? s’enquit finalement Nathan. -Agmar, répondit simplement l’adolescent. Agmar Speinlitz. »
Et ce furent les dernières paroles qu’ils échangèrent ce soir-là. Longtemps ils restèrent là, les yeux dans les yeux, l’un appuyé contre le mur et l’autre accroupi. Quand tous deux se séparèrent enfin, ils reprirent chacun le chemin de leurs maisons, l’un une trousse à la main et l’autre des pensées plein la tête.
P-S : Tu vois Menta', je suis aussi capable d'utiliser des vrais prénoms !!! Alors, qu'est-ce que l'on dit ? Hein ? ...Mais quelle polyvalence ma chère Djevelen !!! (1) : - Saitama:
Saitama est le héros d'un manga réalisé dans le but de se moquer des héros trop fort des autres shonen (manga pour garçon). Saitama est un personnage blasé, chauve, moche, mais c'est extrêmement drôle. Il peut envoyer ses ennemis au tapis en un seul coup de point. Maintenant, les images ! :
(2) : - Bakuman:
Bakuman est un manga dans lequel on suit les aventures de deux lycéens ayant décidés de devenir mangakas.
(3) : - Akame:
Akame est un des personnages principaux du manga Red eyes sword ou Akame ga kill. C'est un perso mystérieux qui tue énormément :
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| | | Djevelen Roi des posts ? Oui, ça me va
Nombre de messages : 1281 Age : 22 Localisation : Dans les vapes... Loisirs : Etre ici, tout simplement. Date d'inscription : 30/08/2016
| Sujet: Re: Otaku Dim 5 Nov 2017 - 15:17 | |
| Si ce chapitre a une fin un peu décousue, je m'en excuse. C'est parce que cela faisait une éternité que j'avais cessé l'écriture de cette histoire. Donc, la reprendre est assez difficile. Désolée ! Chapitre 5 : - 5 :
« Agmar, mon chou, viens là s’il te plaît ! » Rien. Pas un bruit, pas un signe de vie. Rien. « Agmar ! Enfin mon lapin, sors de cette chambre ! » Un grognement, une masse informe sous la couette. Mouvement. « Tu sais bien que ton père tient beaucoup à ce que ce déjeuner se passe très bien alors va vite te doucher et mettre ton beau costume ! » Soupir. Nouvelle tentative. « Mais si, tu sais ? Ce costume noir, là… Celui que nous t’avons offert l’année passée ! Celui dans lequel tu fais si mignon ! » Silence. « Maman… » Doute. « Oui ?... » Hésitation… Nouveau soupir. Résignation. « …J’arrive ».
Celui dans lequel tu fais si mignon ! Pff… Mignon ? Agmar pesta. Entre cette chemise blanche qui lui collait à la peau en l’empêchant de respirer convenablement, ce pantalon noir trop chaud et cette veste trop grande pour son corps malingre, il se serait qualifié de tout sauf de « mignon » et de sa multitude de synonymes. « On dirait plutôt un manchot… grinça-t-il entre ses dents serrées. » Il passa une main sur ses yeux en maudissant ses parents d’organiser aussi souvent des repas d’affaires ou des fêtes ridicules entre « gens de la haute » auxquels il était obligé d’assister. Il regarda l’heure machinalement et se crispa. Onze heures vingt-sept. « Encore trente-trois minutes avant que l’enfer ne commence… soupira le jeune homme. » Lentement, après avoir jeté un dernier coup d’œil à son reflet, il sortit de la salle de bain en se faisant aussi discret que possible. Il comptait bien échapper à sa mère qui voudrait à coup sûr lui parler pendant tout le temps qu’il restait avant l’échéance des merveilleux invités qu’ils recevaient. C’est donc sur la pointe des pieds qu’il regagna son domaine toujours aussi peu éclairé et s’y installa tranquillement en redémarrant son épisode de No Game No Life. Samedi. Jour d’ennui morbide et de décadence des ploutocrates. Hourra !... Chaque week-end, c’était la même rengaine : « Comment ? Tu voudrais passer la journée seul à regarder tes animés ? Et bien non, désolé chéri ! » Il abattit son poing sur le bureau. Pourquoi ne tenait-on jamais compte de ses vœux ? Il en avait plus qu’assez de jouer le cobaye pour ses parents devant des inconnus qui semblaient le connaître mieux que lui-même ! « Choupinou ? appela sa mère d’une voix perçante et toujours aussi insupportable. » Et voilà que ça recommençait ! « Arrête de gueuler, j’arrive ! s’emporta l’adolescent en tapant du poing sur son bureau. » Seul un silence gêné lui répondit. Sans s’en formaliser, il se leva de son siège, mit l’épisode en pause et se dirigea vers le salon. « Chouette ! » pensa-t-il lorsqu’il vit les invités déjà présents. Ils étaient au nombre de sept et le fixaient tous de ce même regard effaré sans qu’il n’en comprenne immédiatement la raison. Puis, après quelques secondes extrêmement étouffantes, Agmar sourit. En réalité, il en avait une petite idée et se tourna vers Marie Speinlitz pour confirmer ses doutes. Pantelante, elle se contentait de le fixer de cet air de merlan frit qu’elle affichait parfois sans s’en rendre compte. Eh oui, il avait vu juste… « Ché… Chéri ? Qu’est-ce qu’il te prend, Agmar ? Me… Me parler ainsi… Devant nos invités, qui plus est… -Parce que, s’ils n’avaient pas été là, j’aurais pu ? la coupa l’adolescent d’une voix faussement naïve. » Sa mère le fixa d’un regard étrange. Jamais il ne l’avait traité de la sorte. Jamais il ne lui avait tenu pareils propos acerbes et elle en était terriblement troublée. Sans la Badinerie de Bach en fond sonore, le silence serait roi dans l’appartement. Grâce à dieu, l’une des invités fit tomber une verrine au pamplemousse qui se brisa sur la moquette en un bruit assourdissant faisant reprendre conscience à tous ici présents. Tandis que sa mère, en bonne hôte qu’elle était, ramassait les dégâts en babillant joyeusement, Agmar s’éclipsa dans la salle à manger. Une fois sûr qu’il était seul, il souffla de soulagement et essuya la sueur sur son front. Cette atmosphère si pesante l’avait fatiguée à un point… ! Heureusement que son père n’était pas encore rentré sinon, il aurait pu dire adieu à sa pauvre vie. Jamais il n’aurait permis que quelqu’un, et encore moins son fils, ne parle ainsi à sa femme. Rudolf Speinlitz était un homme qui édictait les règles et était prêt à tout si on les transgressait. Il avait des principes vieux comme le monde mais y tenait particulièrement. Ceux-ci venaient de sa noble famille allemande. Son arrière-grand-père, Archibald Agmar Speinlitz, avait été le fondateur d’une immense entreprise de commerce dont Rudolf était aujourd’hui le PDG. Au début, elle n’était pas aussi importante, mais toute la famille avait travaillée à son développement économique et l’entreprise n’avait pas tardé à décoller. C’était désormais l’une des firmes les plus connues au niveau national et quiconque entendait le nom de « SklareicH » savait immédiatement de quoi il s’agissait. Rudolf Speinlitz, extrêmement fier de son entreprise, passait donc plus de temps à s’en occuper qu’à prendre soin de sa famille. Ah, sa famille… Parlons-en d'ailleurs ! A ce propos, Rudolf était très embêté. Il s’était marié à Marie Depronne il y a de cela quinze ans car elle était particulièrement bien placée socialement et faisait partie des grandes fortunes de France, mais il n’avait pas prévu que sa compagnie l’épuiserait au plus haut point. Naïve, idiote, insouciante… Rien n’allait ! Au moins était-elle assez jolie pour qu’il se force le temps qu’elle soit enceinte. A partir de ce jour-là, Rudolf s’était largement détendu. Maintenant, il avait assuré sa descendance et ne serait plus obligé de coucher avec sa femme. Il espérait que ce serait un garçon brillant qui reprendrait le flambeau de l’entreprise à sa mort. Et oui, ça avait été un garçon… Oh oui, brillant, oui… Mais quel fardeau ! Rudolf avait tout fait pour qu’il s’intéresse à la finance dès son plus jeune âge afin d’en comprendre les fondements le plus tôt possible, mais c’était peine perdue. Il lui avait donné le nom du fondateur de SklareicH, des livres de comptes pour s’entraîner à lire, des costumes pour se déguiser, mais rien n’y faisait… Un peu plus tard, lorsqu’ Agmar commença les maths, Rudolf Speinlitz utilisa son dernier atout. Il l’entraînait des heures entières à résoudre des problèmes d’argent. Avec joie, il découvrit alors que son enfant était surdoué et que les mathématiques ne lui posaient aucun souci. Enfin, en pratique, du moins… Effectivement, Agmar n’aimait pas ça. Lui, ce qu’il voulait, c’était courir, s’amuser dans les parcs, aller chez ses amis… Bref, tout sauf des calculs embêtants ! Mais son père lui répétait sans arrêt que ses camarades n’étaient pas dignes d’intérêt car beaucoup moins intelligents ou promis à de grandes choses et c’est ainsi qu’Agmar grandit dans une prison grotesque qui l’étouffait bien plus qu’elle ne lui permettait son envol. Rudolf Speinlitz, à cette époque, était fier de son fils. Certes ce dernier était plutôt renfermé et peu jouasse, mais ces traits de caractères lui permettraient dans le futur de ne pas se détourner de son travail comme le faisaient la plupart des nouveaux riches qu’il exécrait. Malheureusement pour lui, Agmar en eut vite assez. Pendant trois ans, du CE2 au CM2, il avait feint de s’intéresser à ce que lui faisait faire son père car c’était le seul moyen qu’il avait pour passer du temps avec lui. Néanmoins, au bout de ces années d’enfermement et de travail, le petit garçon qu’il était alors vomissait les maths. Chaque jour, du matin au soir et du soir au matin, Agmar n’avait pour seule pensée que des calculs et des problèmes tournant en boucle dans son esprit. Il ne connaissait rien du monde qui l’entourait, de la vie des autres, des jeux de son âge, rien. Il n’avait aucun sentiment autre que l’envie et le dégoût. L’envie que tout cela s’arrête, l’envie de ne plus passer ses soirées entières devant des cahiers remplis de formules inscrites à l’encre. Le dégoût du papier, le dégoût de ses doigts sans arrêt tachés de bleu ou de noir et le dégoût de lui-même. Oh oui, le dégoût que lui-même se procurait était sans doute le pire. Il savait bien qu’aucun autre enfant de son âge ne passait autant de temps à faire ce que lui faisait tous les soirs. Peut-être n’en avaient-ils pas besoin, se disait-il. Peut-être savaient-ils déjà tout. Peut-être que son père le forçait ainsi car il n’était pas assez fort pour lui. Après tout, ce devait être de sa faute ! Agmar grandit donc loin de tout, de gens comme de la vie, mais surtout, de tout sentiment humain. Ainsi, il était assez impulsif. Il ne se rendait apas vraiment compte de ce qu’il disait ou faisait et si ses actes auraient des répercussions. C’est pourquoi Agmar préférait garder silence en toutes circonstances, accompagné ou non. Mais, parfois, il en avait plus qu’assez et ses émotions ressortaient d’un coup, ce qu’haïssait par dessus tout son père.
En fait, après relecture, je me rends vraiment compte que la fin n'est pas tip-top... N'hésitez pas si vous avez des idées à me soumettre ! | |
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