Bonjour ! Bon, autant vous dire que je suis toute nouvelle et que je c'est la toute première fois que je poste quelque chose sur ce forum, de toute façon, vous l'avez sûrement remarqué
Mais ce n'est pas la première fois que je poste cette histoire (Que je suis en train d'écrire depuis un p'tit moment maintenant ^^") et j'aurais tout de même besoin d'avis différents, donc je me fie à vous !
Je poste pour le moment un prologue et mon premier chapitre.
(Edité avec correction)Prologue
J’ai vu sa maison brûler. De loin, mais je l’ai vu quand même. Avant, je ne savais pas que c’était la sienne. Je savais juste qu’une habitation brûlait, une habitation qui contenais des gens. Des gens qui allaient mourir. C’était inévitable.
A cet âge-là, je n’avais pas encore le courage de me plonger dans les flammes, vêtu d’un simple pyjama. À cet âge-là, j’avais conscience de mes capacités, bien sûr. Je savais que j’aurais peut-être pu faire quelque chose, rien qu’en appelant la police ou les pompiers. Mais c’était aussi cet âge, où la peur prend le dessus. J’avais cet âge-là, qui me forçait à rester planté-là, trop terrorisé pour pouvoir bouger.
Les flammes noircissaient la plupart des fenêtres, celles des pièces où tout était déjà en train de cramer. Bizarrement, le feu n’avait pas encore consumé certaines pièces. Du moins, pas entièrement. On voyait la fumée, juste de la fumée. Le brasier semblait hurler, comme s’il avait eu don d’une voix. D’une horrible voix criante.
Soudain, à l’étage, on a ouvert une fenêtre. La voix de l’incendie me vint alors encore plus forte, mais ce n'était pas tout. J’ai aussi entendu des cris. Des cris d’humains. Je me suis approché de la fenêtre, sans faire attention aux gens aux alentours. Dans les maisons voisines, j’ai entendu des femmes hurler, des portes claquer, des pas foulants le gravier, puis des respirations, des cris, des doigts s’agitant sur leurs téléphones dans mon dos. À la fenêtre ouverte de l’étage, j’ai vu une silhouette massive se découper dans l’embrasure noire, puis une voix s’élever « Derreck, arrête, tu vas la tuer ! ». J’ai vite compris que si l’homme – ce Derreck – avait cet aspect corpulent, c’était parce qu’il tenait quelqu’un chose dans ses bras. Quelqu’un. Quelqu’un de grand, tout roulé en boule contre son torse. Peut-être était-ce son enfant ? À Derreck. Du moins, ça en avait l'air, d'un enfant.
De loin, j’ai entendu les sirènes des voitures et des camions se rapprocher. Quelqu’un avait appelé les secours, quelqu’un avait été moins débile que moi. Mais Derreck n’a peut-être pas entendu, lui ? Oui… Ça pourrait expliquer… En même temps, il était pressé par les flammes dans son dos… D’ailleurs, comment se faisait-il qu’ils étaient encore vivant, eux, tout les trois ?
Je ne comprenais pas… Pas plus que je ne comprendrais le geste qu’il aura, à peine quelques secondes plus tard.
Cette image, horrible, m’a toujours hanté. Elle m’a fait faire des cauchemars atroces, me mettant à la place de cet être tout entortillé dans les bras de son père. Cet être qui devait à peine avoir le même âge que moi.
Un père pouvait-il vraiment faire preuve d’une telle cruauté ? Le mien sûrement. Mais pourquoi le sien ? Ce n'était pas vraiment juste. Mais en même temps… Etait-ce injuste ?
J’ai vu Derreck tendre les bras devant lui, dans le vide. Et puis il l’a lâché.
La fille.
Dans la maison en flamme, le cri d'une femme a retenti et une autre silhouette s’est postée de la fenêtre. Elle s’est inclinée en avant, le buste déjà dehors. Elle était sur le point de basculer tellement elle était penchée. Puis l’homme a crié à son tour. Un nom.
« Olivia ! »
Pendant des années, j’ai crus que c’était sa fille qu’il appelait. Je sais, ça n'a pas vraiment de sens - jeter sa fille dans le vide et puis l'appeler, comme si il ne l'avait pas fais exprès. Mais je le pensais vraiment.
J’ai vu ses cheveux fouetter le vent - ses cheveux long, aux pointes scintillantes de braise. Sa chemise de nuit à voler dans l’air et pendant une fraction de seconde, tout a semblé s’arrêter. Le monde a cessé de tourner, juste pour elle, pour qu'elle s'en sorte, qu'elle ne se fasse trop mal. Sous mes yeux, ce spectacle terrible s’est figé et je ne me suis même plus entendu respirer. Mais tout ça n’a duré qu’une seconde.
Une toute petite seconde.
J’ai sentis ma peau se tendre, dessous, mes muscles se sont contractés à l’extrême, puis se sont tordu, à l'instar de mes os. Je faisais des efforts surhumains pour rester debout.
Surhumain…
Une seconde et je suis tombé à genoux, serrant les lèvres et me mordant les joues pour ne pas hurler. Tous ça, c’était tout nouveau pour moi, je ne m’étais pas encore habitué à la douleur. J’haletais, sentant mon corps changer, se disloquer, se déformer. Et la douleur s’amplifiait à chaque inspiration.
Tout ça, c’était trop nouveau pour mon jeune corps.
Non… pas ici… Pas devant tout le monde, comme ça. Papa me tuerait, au sens propre.
Alors, comme un gamin terrorisé, j’ai détalé. J’ai courut aussi vite que je le pouvais, essayant de braver la douleur pendant un instant. Derrière-moi, j’avais laissé Derreck, Olivia et la fille, les cheveux aux pointes de flammèches.
Je les avais laissé mourir pour mon secret. Pour ce qu’il valait. Et je me suis haï, plus que tout. Je me suis détesté pendant des années pour ça.
C’était en partis mon boulot, merde !
Jusqu’à alors hier, je faisais des cauchemars récurant de cette atrocité, de ce que j'avais laisser tomber. J’avais détruit quelqu’un derrière-moi, une famille. Peut-être même plus que ça.
Elle… Moi… Ce que je suis… Ce qu’elle sera…
Ce qu’elle est, ce qu’elle représente.
Ce qu’elle n’est pas censé dire, ressentir. Juste autorisée à rêver.
C’est peut-être de ma faute.
Une bêtise, une deuxième... Mais pas une troisième. Non. Je refuse de la faire souffrir encore une fois.
Tout ça...
C’est ce que nous sommes…
Chapitre 1
Don’t know what’s down this road, I’m juste walking
Trying to see through the rain coming down
Even though I’m not the only one
Who feels the way I do « A Place In This World »
En lisant ces lignes, vous allez sûrement vous dire : oh l’aubaine, vachement innovant le coup de la fille qui se réveille en se sentant différente. Pourtant, c’était presque ça.
Quand je me réveillai ce matin-là, j’avais comme une espèce de boule au ventre. Quelque chose qui pesait une tonne, la charge étant plus lourde qu’un enfant. Ou non… non, ce n’était pas ça. Ce n’était pas… pas quelque chose de concret, pas quelque chose que je pouvais toucher ou même m’imaginer en rêve. Non, c’était un truc… indéfinissable. En fait, je ne savais pas grand de chose de cette sensation : juste que je n’y comprenais rien du tout. Bah c’est vrai ça, c’était quoi cette espèce ce… truc d’angoisse ? En parlant de ça d’ailleurs… d’où elle venait, cette angoisse ? Avoir peur de quelque chose dont on ne sait rien, qu’on ne connaît pas à l’avance… hum, bizzare, hein ? Mais, étrangement, j’avais l’impression que cet espèce de… euh… pressentiment, était comme une mise en garde de mon subconscient. Lequel semblait déjà bien au-dessus de tout ça, lui.
Ça aussi c’était une certitude. Et pourtant, je n’en savais rien.
J’écoutais distraitement la pluie battante qui hurlait à travers le carreau de la vitre. Je me levai, la vision encore un peu floue et m’approchai de la fenêtre. Dehors, des milliers de minuscules gouttes d’eau se précipitaient, guidées par les rafales de vent qui fouettais les arbres, qui balançait à son rythme affolé. Les bourrasques frappaient les maisons qui, elles, ne bougeaient pas. Fidèles à leurs propriétaires.
Est-ce que je parais bizarre si je dis que j’aime ce spectacle ?
Quand je voulais me changer les idées et pour moi, rien de mieux que la danse perpétuelles des flammes dans la cheminé où d’un déchainement de la nature contre nos fragiles installations. J’eu soudain des doutes sur la sécurité de mon monde. Tout pouvait s’effondrer si vite…
Je fronçai les sourcils puis secouai la tête. Je me faisais peur à moi-même !
Je descendais rejoindre Diane en bas et la trouvais dans la cuisine. Endroit où, je tenais à le préciser, elle ne cuisinait jamais.
Alors, qu’est-ce qu’elle faisait là ?
À mon entrée, je fus d’emblé frappée par l’odeur insistante de la viande cuisant dans le four. J’eu un haut-le-cœur. Franchement, je n’avais pas envie d’un rôti ou quoi que ce soit dans ce genre pour le petit déj’. Nan, trop écoeurant.
Hein ?
Du rôti ? Je vérifiai l’heure sur le micro-ondes : dix heures.
Attendez une seconde… Diane, dans la cuisine, en train de cuisiner du
rôti à dix heures du matin ?
Oui, Diane n’était pas vraiment le genre de personne à se mettre aux fourneaux de bonne heure. Elle préparait souvent le repas à la dernière minute – quand elle le faisait, car, le plus fréquent, était qu’elle ne s’y mettait même pas.
Je commençais à avoir de sérieux doutes sur la journée en prévision ; elle promettait d’être… étrange. Pour le coup, j’espérais me tromper.
Je scrutai Diane, incrédule et craintive, s’activer sur le plan de travail dans sa posture habituelle : stressée et trop concentrée. Je ne comprenais pas vraiment… J’avançai prudemment, ne sachant pas trop si j’étais tombée dans une version parallèle de mon monde à moi, qui se résumait à dormir, sortir et bosser. Mais avant même que je puisse poser une question, Diane, qui se tournait dans ma direction, m’envoya une gifle accidentelle en voulant attraper quelque chose sur la table derrière elle. Dans le feu de l’action, ma présence lui avait été complètement invisible. Mais quand même !
- Oh excuse moi ! Fit-elle en joignant ses mains en coupe devant sa bouche. Puis, deux secondes plus tard, elle se tourna vers le feu derrière elle, agitant frénétiquement d’une cuiller la mixture rouge qui chauffait tranquillement dans une casserole, ayant déjà oublié la marque sur ma joue. Moi, il m’était plutôt difficile de l’ignorer ! Mais bon, c’était le matin, je n’avais pas envie d’une prise de bec de si bonne heure.
- Euh… Diane, tu es… qu’est-ce que tu fais ?
- Je cuisine, ça ce vois non ?
Oh, parce que asperger le lino de sauce tomate, c’était de la cuisine ?
- Oui mais…
J’hésitai à finir ma phrase. Est-ce que ça la blesserait ? Je cherchai une phrase qui ne soit pas trop directe, pas quelque chose comme…
- Pourquoi ?
Elle soupira, comme lasse est vaincue. Oups !
- On reçoit aujourd’hui, s’expliqua-t-elle.
On reçoit ? Et depuis quand ? Et pourquoi je suis toujours la dernière personne prévenue ?
- Ça c’est décidé à la dernière minute ?
Elle tourna vers moi un regard bizarre, puis repris le contrôle. Je lui avais déjà vu, ce regard, comme si j’avais dit une chose tellement idiote que je méritais d’être internée rien que pour cette phrase.
- Je ne t’en avais pas parlé ?
- Euh… non.
Elle repartit faire le tour de la cuisine, s’agitant comme un bébé le ferait s’il avait perdu le bout de couverture puant le vomi lui servant de doudou. Autrement dit, comme une maniaque.
- Josh est au courant ?
Ce fut le placard qui me répondit par un claquement violent. J’imaginais que cela voulait dire « Non ». Ou peut-être « Va te faire voir » ?
Je pense que j’étais bien tombée dans une version parallèle de mon monde. Une variante où les Diane faisaient de la cuisine et où les placards insultaient.
Diane cherchait toujours sont « quelque chose » et je devinais qu’elle avait épuisé toutes ses ressources quand elle braqua sur moi son regard. Une rage propre à elle irradiait dans son regard, le genre de regard qu’elle avait quand quelque chose allait de travers.
- Tara…
- Quoi ? M’offusquai-je d’une voix trop aiguë, les yeux ronds.
- Où sont passés les oignons ?
Elle avait bien séparé chaque mot, les prononçant clairement, pour qu’ils pénètrent encore plus clairement dans mon esprit. Ce qui ne rata pas. On aurait dit que sa voix provenait des tréfonds des ténèbres ; peut-être pas la voix de Satan même, mais un affreux démon faisait bien l’affaire. Mes poils se hérissèrent sur mes avants bras : mais où étaient les oignons ?
Je haussais franchement les épaules, voulant passer pour désinvolte, mais je savais que mon visage me trahissait.
- Josh !
Ici, son cris venait du profond de sa gorge, et je fus surprise qu’elle eu encore la capacité de parler après un son d’une telle ferveur. Diane était également le genre de personne pleine de ressources. Même quand la situation ne l’imposait pas. C’était très étrange…
- Si tu veux je peux…
- Oui, va me chercher les oignons. Merci Tara.
…Aller réveiller Josh, mais, en y réfléchissant bien, le tirer de son sommeil aurait eu plus de conséquences que si j’allais simplement chercher les oignons. Et puis, le colonel avait parlé !
- Ne reste pas plantée là ! Si tu ne te dépêches pas, ma sauce va cramer !
- Tu sais que tu peux aussi arrêter le feu ?
- Oh, vas me chercher ces stupides oignons, c’est tout ce que je te demande.
Stupides ? Ah, enfin nous étions d’accord sur un point.
Dans les hyper-marchés, il y avait toujours toutes sortes d’oignons : certains déjà mis en filet, d’autres en grappes, provenant quasiment tous de régions différentes. Il y en avait aussi qui étaient plus rosés au niveau du bulbe. Enfin bref, j’avais le choix niveau oignons. Mais il restait aussi l’ail…
Je me tâtais, Diane verrait-elle la différence entre des oignons et de l’ail ? Elle cuisinait tellement peu de toute façon que ça m’aurait étonné que ce soit une experte en la matière. Et puis, de toute façon, elle était tellement perturbée par ce déjeuné que je doutai fort qu’elle y fasse réellement attention. Mais à quoi pourrait bien me servir de lui jouer ce tour ? D’ailleurs, je ne préférais pas trop confronter Diane à un teste sur les herbacés.
Une fois après avoir pris une botte d’oignon au hasard ainsi qu’un café glacé et avoir payé le tout, je sortis du magasin. La pluie nous faisait encore honneur et j’hésitai un peu à me jeter dehors. Je n’avais pas pris la voiture, je ne savais pas trop pourquoi. En fait, j’avais cru que la pluie s’arrêterait au bout d’un moment, mais il n’en était rien. Elle s’était certes un peu calmée, mais au final, il pleuvait toujours. Au moins, avec la quantité de vent que je me recevais en plein visage, j’avais bien le temps d’emmagasiner un peu d’air avant de rentrer et d’affronter le général qui dictait la maison. J’imaginai déjà toute la tension qui devait y régner et, pour tout dire, ce n’était pas vraiment un de mes tableaux préférés.
Une bourrasque cingla l’air, et moi avec. Je resserrai mon manteau autour de mes épaules, le froid s’incrustant dans ma peau jusqu’aux os. Quelle idiote ! J’aurais du prendre la voiture, je n’aurais pas été aussi trempée au moins. A présent, je regrettai amèrement mon choix.
Je ne m’étais pas encore débarrassée de ce malaise tout nouveau et dérangeant. Ce qui me paraissait étrange. J’avais cru que prendre l’air me ferait du bien, mais non. Il fallait croire que ça ne disparaissait pas comme ça, ce genre de truc. Et pour cause, il n’avait fait que se préciser. J’espérai qu’après une bonne nuit, il s’en irait.
Je sorti mon café du mon sac et commençai à boire. Une image étrange j’imagine. Une fille, se baladant sous une pluie battante avec un sac d’oignon à la main, comme s’il faisait grand soleil. Nous étions en pleine saison d’automne et la région n’était pas connue pour son beau ciel bleu et son soleil de plomb. Plutôt pour ses couches de neige incessantes l’hiver et ses vingt degrés seulement l’été. J’avais eu beaucoup de mal à m’habituer à l’absence de chaleur, mais finalement, j’avais réussi. Maintenant, la pluie et la neige ne me faisaient plus peur.
Je pris une autre gorgé et alors, quelqu’un me bouscula et tout le café se renversa sur mon manteau, imprégnant le tissu de son odeur sucrée. Perdue dans mes pensées, je n’avais pas vu l’importun arriver. J’aurais bien voulu prétendre que c’était la pluie qui m’avait empêché de le distinguer, mais ça aurait été un affreux mensonge. Or, je ne voyais pas de raison de mentir.
- Oh non !
- Désolé, mais t’avais qu’à regarder, dit une voix railleuse au-dessus de ma tête.
Hein ? Mais c'est quoi ce type ? C’était lui qui m’avait foncé dessus ! Et il osait rejeter la faute sur moi ? Ah, j’allais lui montrer à ce gars-là !
- Ce n’est pas moi qui m’amuse à foncer sur les gens !
- Parce que tu crois que c’était délibéré ?
- C’était assez difficile de me manquer.
Là, j’exagérais. A vrai dire, moi-même je ne l’avais pas vu venir. Il avait toutes les raisons du monde avec lui. Pourtant, je m’entêtais à vouloir gagner la bataille. Il était hors de question que je laisse un type pareil gagner. Même si, sans vouloir faire de parenthèse, il avait la voix la plus magnifique qu’il m’ait été donné d’entendre. Oui, une magnifique voix grave, mais pas trop quand même. Juste ce qu’il fallait pour paraître sexy sans pourtant trop en faire. Je ne savais pas vraiment où je voulais en venir, mais cette voix avait quelque chose d’hypnotisant, de captivant…
Je secouai la tête. On ne pouvait pas simplement se fier à une voix, n’est-ce pas ? D’ailleurs, ce garçon en était la preuve vivante. Je ne voulais pas perdre la tête à cause d’une simple voix, je méritais mieux que ça quand même.
J’entendis son rire ironique résonner à travers les gouttes de pluies, s’emblant m’envoyer toujours son écho moqueur qui m’était déjà insupportable.
- Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle.
- J’essayais juste de détendre l’atmosphère.
- Tu en es loin.
- Je sais.
Je grinçai des dents. Il ne pouvait pas me laisser le démolir sans en placer une ?
- Non.
C’était la seule chose intelligente qui m’était passé par la tête, et je l’avais dite. Je n’en étais très pas fière.
Je l’entendis soupirer plus que je ne le vi. Il faisait assez sombre, et je ne distinguais pas son visage, juste sa carrure. Je me demandai s’il pouvait voir le mien. Après tout, il me dépassais d’au moins une dizaine, voir une quinzaine de centimètres. Peut-être que de là, c’était plus simple ? Je n’étais pas vraiment à l’aise, il fallait bien l’avouer. A plat dans mes tennis, je lui arrivais à peine à l’épaule. De nous deux, c’était lui qui avait l’avantage, autant par sa taille que par ses répliques.
- Cette conversation ne nous mène pas loin.
Le sourire dans sa voix était évident, presque autant que l’ironie. Pour le coup, j’étais d’accord avec lui, mais pas question de l’avouer. Alors, comme je ne savais pas quoi répondre, je suis partie, le laissant là. Je ne trouvai pas de riposte cuisante à lui servir, et il m’avait déjà bien humilié comme ça. Je décidai de mettre un terme à cette discussion sans queue ni tête avant que ce soit lui qui le fasse et me plante là. Mais bien sûr, entêté comme il était, il ne me laissa même pas le temps de faire trois pas. A peine j’avais levé la jambe qu’il m’avait attrapé par le poignet, me clouant sur place. Je ne savais pas si c’était sa force physique ou celle de ma volonté qui m’empêcha de détaler, mais je m’interdis d’y penser.
- Excuse moi.
Sa voix ne trahissait rien, ni une pointe d’ironie, de moquerie ou même d’excuse. J’étais incapable de dire s’il était sincère. Un de ses doigts frôla ma main et à l’instant même où sa peau était entrée en contacte avec la mienne, j’ai sentis mes jambes se dérober sous moi, sans pourtant complètement me lâcher. Soudain, je me sentis bizarre, comme molle et vidée. J’eu l’impression que les couleurs se brouillaient, que les formes se disloquaient, renonçant à leurs apparences géométrique. Je m’agrippais à sa main, mais cela ne me servi à rien. Lui aussi chancelait, je voyais qu’il peinait à rester debout, tout autant que moi. Je voulais dire quelque chose, mais mon cerveau n’arrivait plus à former de pensées cohérentes.
Soudain, il se détacha de la prise que j’avais sur sa main, coupant le seul contact physique entre nous. D’un coup, tout redevenait clair. J’essayai de me remémorer les dernières paroles qu’il m’avait dit.
Excuse moi. Je hochai brièvement la tête, chassant le flot de questions qui m’encombrait, puis, comme j’en avais eu l’intension un peu plus tôt, je partis, le laissant seul. Mais cette fois là, ma fuite était motivée par d’autres raisons. Je ne jetai pas un regard en arrière, mais je savais que lui, n’avait pas bougé.
- Trente minute ! C’est trente minute qu’il t’a fallu pour aller chercher ces fichus oignons ! Mais qu’est-ce que tu faisais ? Se récria Diane quand j’arrivai à la maison à bout de souffle, mes cheveux et mes vêtements dégoulinants sur le sol fraichement lavé. J’avais espéré qu’avec toute cette eau, l’odeur de café s’atténuerait. Heureusement, quand Diane arriva vers moi pour m’arracher le sac des mains, la seule chose qu’elle dit fut :
- Tu sais combien de temps j’ai passé ce matin à tout nettoyer ? Tu vas aller te changer, et vite ! Et tu n’as même pas intérêt à salir le sol !
Je m’exécutai, montant en trombe dans ma chambre. Derrière moi, je tirai le loquet et, bien enfermée, je retirai mes vêtements trempés, les jetai en boule sur mon lit et choisis quelque chose d’un peu plus présentable à me mettre sur le dos. Je choisis donc une jupe haute toute noire avec des collants opaques et un tee-shirt. Je m’apprêtais à partir quand, en jetant un regard sur ma pile de vêtements mouillés, je vis mon manteau emmêlé dans la cohue. Je revins sur mes pas et, tout doucement, je le pris et le considérai un moment. Je ne comprenais pas pourquoi je n’arrivais pas à imaginer ce manteau crotté dans la pile de linges sals. Pourquoi je ne voulais pas que cette tache parte maintenant. Une tache aussi puante et énorme comptait à mes yeux maintenant ? Non, bien sûr que non ! Et pourtant…
Je fermai les yeux et avançai de quelque pas. Je fis un tour complet sur moi-même, puis un autre, et encore un autre. Complètement déstabilisée, je jetai le manteau au hasard dans la pièce, l’envoyant balader dans un endroit inconnu. Quand j’entendis l’étoffe gémir quand elle toucha… ce qu’elle toucha, je sortis en courant vers la salle de bain. Je ne voulais pas savoir où il avait atterri. Je m’appuyai sur le lavabo, pris une serviette et m’ébouriffai les cheveux. Puis, je pris une brosse et commençai démêler. Juste quand les poils se prirent dans un énorme noeud, j’entendis Diane m’appeler au rez-de-chaussée.
Mince ! Je laissai tomber la douleur et y allait franco. Je m’arrachai quelques cheveux par-ci par-là, mais rien de dramatique, hormis pour mon cuir chevelu.
Je descendis en lançant un regard sur la pendule : midi moins dix. A quelle heure les invités surprises étaient censés arriver ? J’entrai dans la cuisine, où Diane coupait les oignons en rondelles. J’étais impressionnée, elle se débrouillait plutôt bien.
- Va mettre la table avec Josh, me dit-elle d’un ton égal sans même se retourner. Six couverts.
Je comptai dans ma tête… nous recevions donc une famille de trois ? Josh, qui maintenant était on ne peu plus réveillé, me jeta un regard presque compatissant. Il alla vers moi tandis qui je m’éloignais de la cuisine. Je me dirigeai vers l’armoire du salon qui contenait tous l’attirail pour une table parfaite.
- À ton avis, elle restera comme ça toute la journée ? Non parce que, eum, comment dire…
Je sortis une nappe blanche toute simple et la considérai un moment.
- Si tu insinues un éventuel laissé-passé pour se tirer d’ici, je te suivrais de bon cœur, commentai-je en levant les yeux vers lui, prenant une mine peinée horriblement fausse. Mais elle met tellement d’espoirs dans ça sauce… Se serait tellement cruel de la planter.
Josh se tortilla sur lui-même, un peu gêné me semblai-t-il.
Moi, je cherchais des serviettes marron.
- Ouais mais là, elle me fait un peu flipper, tu vois ?
Je me tournai vers lui.
- Dis, c’est quoi le mieux ? Le vert ou le marron ?
Il me regardait, l’air ahurit et complètement déboussolé. Là par contre, je ne comprenais pas vraiment… Qu’est-ce que j’avais dit ?
- C’est typiquement féminin ce genre de réactions ? Parce que sinon, pas de problème, je devient gay.
Je lui fouettai amicalement l’épaule avec mes échantillons de serviettes et grognai gentiment.
- Bon, tu sais quoi, tu t’occupes de la déco. Moi, je vais chercher les couverts.
J’allai dans la cuisine, ouvris le placard et pris six assiettes. Je faillis tout faire tomber à la renverse quand Diane cria. Au même moment, le carillon de la sonnette retentit, assourdissant. Je comprenais maintenant : rien n’était près et les invité arrivaient. En même temps, quelle idée de ne commencer à préparer le repas maintenant ?
- Oh, mais qu’est-ce qu’on va faire… ? Les invités arrivent et le déjeuné n’est pas entièrement près !
- Ne t’en fait pas, c’est peut-être que le facteur, ou la police, supposais-je en haussant les. Vas savoir…
- La police !?
Oups ! - Va te changer et vas ouvrir la porte. Je m’occupe du repas.
- Remue bien la sauce quand tu auras ajouté les oignons surtout, je veux qu’il y en ait partout !
J’écarquillai grand les yeux. Mais de quoi elle parlait ? Remuer la sauce pour qu’il y en partout ? C’était vraiment ses seuls rudiments en matière de cuisine ? Je secouai la tête, me demandant bien où était passé celle de Diane. Après m’être lavé les mains, j’allai jeter les oignons dans la sauce, mais – et heureusement pour ce déjeuné ! – je me rendis compte de leur couleur trop pâle.
Qu’elle idiote !
Elle n’avait pas fait revenir les oignons ! Et elle voulait que tout soit parfais ? Je n’y réfléchis plus : je m’emparai d’une casserole qui, à en juger par l’odeur, devait déjà avoir servi. Je la rinçai en vitesse, mis une flaque d’huile au milieu et fis crépiter les oignons.
- Tara, qu’est-ce que c’est que cette odeur ?
Deux secondes plus tard, la tête de Diane apparue dans l’interstice de la porte.
- Je fais griller les oignons.
Je me rendis compte une peu tard de ma bêtise… Elle écarquilla les yeux comme des soucoupes et se précipita dans la cuisine. Pendant ce temps, la sonnette continuait de gémir. Elle regarda tour à tour la casserole, la porte et enfin moi. Elle posa sur moi des yeux inquiets.
- Quoi ? Demandai-je, méfiante.
- Il faut que… Josh !
J’éteignis le feu et m’approchai de Diane.
- Qu’est-ce qu’il y a ?
- Josh !
Il descendit les escaliers, une expression énervée sur le visage.
- OK, j’y vais, pas la peine de…
- N’ouvre pas !
J’étais plus inquiète par son ton – désespéré me semblait-il – que par son geste. Depuis combien de temps les invités poirotaient dehors ? Il fallait leur ouvrir ! Pour au moins faire bonne figure…
- C’est si jouissif de faire attendre les invités jusqu’à ce qu’ils pètent un câble ? Parce que j’ai l’impression qu’ils vont exploser la porte à force de frapper.
Alors, Josh tourna la tête vers moi et son expression se fit… se fit ? Enfin, c’était quelque chose de bizarre… On aurait dit qu’il avait vu un fantôme. Or, ce n’était que moi. Pourquoi est-ce que lui et Diane me regardaient comme un bête de foire ?
Il sortit de sa transe et vint vers moi à grandes enjambées et me saisi le coude.
- Mais qu’est-ce que tu… ?
Je n’eu pas le loisir de finir ma phrase. Il m’entraina derrière lui, me sortant de la cuisine puis se dirigea vers la salle de bain.
Mais qu’est-ce qui se passait bon sang ?
- Josh, lâche moi !
Il ferma le loquet derrière nous et me pris par les épaules.
- Ecoute moi. Tu vas sortir d’ici et aller chez ton amie pour l’après midi. Tu ne reviendras pas ici, nous sommes d’accord ? Je t’appellerais et seulement là, et pas avant, tu reviendra, tu m’a compris ?
- Mais…
- Promet-moi que tu ferras ce que je te dis, s’écria-t-il tout bas. Promet-moi que tu ne mettras pas un pied dans cette maison avant ce soir.
Je ne l’avais jamais vu aussi sérieux, et pourtant, la situation ne s’apparentait pas du tout au domaine du sérieux. Plutôt à celui de la folie, où alors celui du…
Est-ce que Josh était fou ?
- Non attends, je ne…
De l’autre côté, on pouvait déjà entendre les faux compliments et les veines promesses sur la jeunesse éternelle fuser.
- Promet le moi ! S’exclama-t-il en me secouant vigoureusement.
J’hochai frénétiquement la tête, espérant qu’après ça, il me lâcherait. Raté !
- Tu vas passer par l’entrée de derrière.
- Il n’y a pas d’entrée à l’arrière.
Même mon humour partait en balade. Me lâchant enfin, il ouvrit la petite fenêtre qui se trouvait au dessus de ma tête. Alors, je compris ce qu’il voulait dire « l’entrée de derrière ». Il me pris dans ses bras et porta mes jambes sur le rebord. Une fois assise très inconfortablement, il donna une légère pression dans mon dos mais je restais fermement agrippée à mon rebord. Il était hors de question que je parte d’ici sans avoir quelques explications ! J’estimais au moins mériter ça.
- Je ne partirai pas de là tant que tu ne m’auras pas dit ce qui se passe.
Il se passa une main lasse et résignée sur la figure.
- Tara, tu ne dois pas…
« Tara, tu ne dois pas… » ? Tara, tu ne dois pas
quoi ? Bon sang, il n’avait plus de forfait pour ses phrases, ou quoi ? C’était tellement frustrant ! Il ne pouvait même pas faire l’effort de finir sa phrase, qu’est-ce que je pouvais bien tirer de « Tara, tu ne… »
Oh... Mes yeux se durcirent. J’avais finalement compris et j’étais dégoutée. Peut-être aurait-ce été mieux si je n’avais pas su. Mais merde, comment osaient-ils ?
Comment ! - Non, tu te moques de moi, c’est ça ? Dis moi que c’est ça Josh… dis-moi que ce n’est qu’une blague !
Il me regardait d’un air triste, mais pas que. Il y avait quelque chose d’autre aussi… le tout, c’était de deviner quoi.
- Excuse moi, Tara.
Alors, il me poussa et je tombai dans le vide.
Chapitre 2
Talk to yourself, talk to the tears,
Talk to the man who put you here, and
Don’t wait for the sky to clear. « Come In With The Rain »
Une chute peu faire mal. Voir très mal. Même quand on tombe sur les fesses.
Quand je disais cela, je ne pensais pas vraiment à l’élancement dans mon coccyx, ni à ma future bosse à la tête quand celle-ci avait heurté le mur ; non pas vraiment. C’était quelque chose d’un peu moins concret que la douleur, d’un peu plus profond qu’un contact.
Je restais assise là un moment avant de pouvoir formuler une pensée cohérente. Ce qui ne vint pas tout de suite. Tandis que le vent balayait mes cheveux autour de mon visage, j’abritai ma tête dans mes bras, la protégeant de la pluie glacée. Je ne comprenais pas. Pourquoi m’avaient-ils laissée là ? Ils avaient leurs raisons, sûrement. Mais lesquels ? Non, il n’y avait pas de raison… Aucune.
Je poussai un soupir et contemplai. Le petit jardin qui se livrait à mon regard était bien triste. Et la pluie et le vent n’aidaient pas. Le seul arbre résidait en plein milieu du jardin, grand et fort, comme un pilier qui ne tomberait jamais. Il trônait. Pour sujets, les herbes folles qui m’arrivaient un peu plus haut que les chevilles. On aurait dit un royaume abandonné, déserté par la plupart des villageois, mais certains restaient, tout de même fidèles à leur roi.
Je secouai la tête. Il fallait que j’aille quelque part, me changer la tête. J’avais peur que mon esprit me joue des tours. Je clignai les yeux, les gouttes agglutinées sur mes cils retombèrent comme des larmes sur mes joues. Oh ! On aurait au moins pu me laisser le temps de prendre un manteau ou un pantalon quand même ! Et puis mon portable aussi…
Josh m’avait dit – non,
ordonné – d’aller voir Lindsay. Or, je n’avais pas les clés de la voiture, ni aucun moyens de prévenir Lindsay de mon arrivée. J’aurais toujours pu utiliser une cabine téléphonique, mais je n’avais pas d’argent sur moi. Et mon amie n’habitait pas tout près. Josh n’avait-il pas réfléchis avant de me pousser ? Il ne s’était pas demandé comme j’allais bien faire pour aller chez Lindsay ? Pour une raison qui m’échappait, j’ai voulus éclater en sanglot. Je me sentais rejetée. On m’avait interdit à l’accès à ma maison – ma propre
maison ! – et je n’avait nul part où aller, faute à l’impopularité. Cliché, peut-être ? Non, une horrible et triste ironie du sort ? Oui, et une grosse.
Je ramenai mes genoux contre ma poitrine et croisait les bras autour. J’enfouissais mon visage dans l’étoffé vaporeuse de la jupe, déjà toute trempée. En dépit de ma peine, les larmes ne vinrent pas. Elles ne se pressèrent même pas à l’orée de mes paupières. C’était comme si elles n’existaient pas. C’était frustrant.
Il fallait que je me remue les fesses. Je n’avais pas envie de me démonter, mais je n’avais rien à dire à Diane et Josh pour le moment. Et si les invités ne souhaitaient pas avoir ma présence à leur côté, qu’à cela ne tienne ! Moi non plus. Pourtant, je ne pouvais pas rester là. J’allais me geler sur place. Mon regard se posa sur l’arbre vigoureux devant moi.
Peut-être que… Je me levai et me dirigeai vers lui. En me retournant vers la façade, j’aperçu la fenêtre de ma chambre. Bingo ! Il y avait une branche non loin de la fenêtre, peut-être que si j’arrivais à grimper, je pourrais peut-être me glisser à l’intérieur sans que personne ne me voit. Je ne réfléchissais pas plus. Je me ruai sur le tronc, puis, après avoir glissée trois fois de suite, je décidais de retirer mes chaussures. Les semelles étaient trempées et me faisaient plus glisser qu’elles ne m’aidaient à m’accrocher à l’écorce. Alors, pieds nus, en jupe et collants, le vent et la pluie contre moi, je me suis mise à grimper, la plante de mes talons se plantant dans l’écorce dure et pointue. Les collants s’accrochaient au bois mouillé et me servait d’appui, mais malheureusement, un gros trou s’était formé au pied, au niveau du talon. Bientôt, les collants ne me serviraient plus à rien. Je n’étais pas loin d’une grosse branche quand une bourrasque siffla dans mon dos.
Je lâchai prise.
Je tombais lourdement sur le dos, tremblante, de froid et de rage.
Ah non, c’est hors de question ! Je sautais sur mes pieds meurtris et recommençais l’opération. Cette fois là, je ne tombais pas. Pourtant j’ai bien cru. Derrière moi, la pluie et le vent coopéraient dans le seul but de faire tomber une deuxième fois. Mais non. Non, pas si proche du but. Si j’en avais été capable, je les aurais bien nargué, tout les deux, mais il fallait que je reste concentrée. A présent, j’étais assise à califourchon sur une grosse branche, la plus basse. Il fallait encore que je monte jusqu’à celle-ci, là-bas, qui donnait directement sur ma chambre. Mais restait encore que je puisse m’y hisser sans tomber cette fois. Alors, rassemblant mon courage, je me mettais doucement debout. D’abord, en raison de la mousse glissante dessous mes pieds, je ne fis que m’accroupir, puis, une genou à terre, après m’être assurée que je ne dégringolerait pas de mon perchoir – ce qui serait dommage – je me mettais debout. Une autre bourrasque. Je m’accrochais au gros tronc, plantant mes ongles dedans. Lançant un regard en bas, je regrettais déjà d’avoir laissé mes chaussures. Je levais un bras au ciel, et tentais de saisir la branche au dessus de ma tête.
Je l’ai ! Et moi qui me croyais trop petite ! Bon, il ne restait plus qu’à me rappeler mes cours de gym. La bonne technique, dans ce genre de situation, s’était… ? Je me rappelais bien vite que jamais nous n’avions expérimenté ce genre condition. Il aurait fallu pourtant ! Une personne sur milles – je l’imaginais, parce que je refusais de le fait d’être seule à faire se genre d’idioties – se retrouvait tôt ou tard coincée dans un arbre au beau milieux d’une averse ; d’ailleurs, pouvait-on encore appeler ça une averse ? Je secouais la tête et, sans même réfléchir, je me hissais sur la branche du dessus. Plus que deux. Je me massais les bras puis les pieds. Mes talons étaient tout rouges, et un de mes orteils saignait. Comment est-ce que je m’étais fait ça ? Je ne manquai pas de remarquer le bout de bois profondément enfoncé dedans. Grimaçant, je m’essayais, un peu tremblante, et essayais de l’enlever avec mes ongles crasseux. La collecte fut maigre, carrément invisible même. Saloperie d’écharde ! Tu pourrais bien partir, non ? Bon, pas grave. Je repris l’opération, partie pour deux branches. À peine arrivé à la première, je m’écroulais, le dos contre le tronc. J’avais si froid… Je ne sentais même plus mes doigts et j’avais l’impression que mon orteil enflait. Je me mordais les lèvres, essayant d’arrêter le tremblement incontrôlable de mes membres, mais ça s’avérait peine perdue. Avec ma canine, je mordis ma langue, me concentrant sur cette douleur là, oubliant les autre – celle de mon orteil, de la plante de mes pieds, de mes épaules, de mes mains. Mais finalement, tout se que je réussis à faire, ce fut provoquer le sang dans ma bouche. Je crachai, distinguant mal la couleur sombre du sang dans l’atmosphère obscure des branchages et de l’après-midi orageux. Les feuilles formaient comme un immense dôme tout autour de moi. D’une certaine façon, c’était rassurant, comme un bouclier. Mais finalement, je n’avais pas d’arme. Alors, il fallait fuir. Rassemblant mes forces, je repartis. J’étais arrivée tant bien que mal sur la seconde branche. Celle qui donnait accès à ma chambre. Je m’adossais au tronc d’arbre, à califourchon sur ma grosse branche. Juste devant, à quelques mètres de moi seulement, ma fenêtre, qui demeurait fermée. Je vis mon reflet à travers la vitre. J’étais horrible ! Mes cheveux collaient à mon visage, mes vêtements étaient de travers et étaient totalement imbibés d’eau. J’avais de la boue sur la joue gauche et dans les cheveux. Comment je m’étais débrouillée pour pouvoir me maculée ainsi ? Puis je me rappelais ma chute, j’étais tombée sur le dos. Je n’avais pas remarqué que j’étais tombée dans la boue… Hum, dès que je serais entré, il faudrait que je me concentre sur la manière de prendre une douche sans alerter toute la maison... Mais je n’y étais pas encore. Avançant, toujours assise : je rampais vers la vitre. Je progressais lentement, les secondes s’écoulaient et je n’avais toujours pas touchée au but. Je fronçai les sourcils, vis mon reflet faire de même, puis, doucement, mais dans un geste ultime, je tendis le bras devant moi. Je ne touchais pas encore la vitre. Grimaçant de plus belle, j’agitai les doigts, comme si cela pouvait m’aider et continuais d’avancer.
Enfin ! Ma main rencontra le verre froid et mouillé. La joie explosa dans ma poitrine quand soudain, là, juste derrière, je vis quelqu’un s’avancer. Doucement, le visage dans l’ombre, il parcourait vers moi, et d’une main leste leva d’un coup sec la poignée. À la volé, il agrippa mon bras toujours tendu puis, me tira en avant. Mon abdomen rencontra violement quelque chose, et ma tête percuta la vitre. Deux secondes plus tard, le temps de voir le visage de mon assaillant, mon esprit s’embruma, perdu dans les abimes de la torpeur, oubliant le visage.