la petite maison

c'est la fête de mère et c'était important,
au minimum ces deux fils doivent appeler.
enfoncée dans son fauteuil, le sien, celui du coté gauche du lit, elle regarde son portable , coincé entre une boite de kleenex et son pilulier.
un pilulier bleu, un peu de médicaments contre la douleur, un peu de médicaments contre l'angoisse, les heures sont si inutiles parfois...
elle attends dans son fauteuil.
c'est un grand fauteuil profond et confortable.
de l'autre coté du lit il y en a un autre, tout aussi confortable, celui de son époux
on partage encore le lit, mais pas les fauteuils, moulés aux corps de chacun, moulés à la respiration de chacun, au rythme de sa vie.
son mari n'a pas de pilulier, pas besoin.
il a les télécommandes.
il est responsable des programmes de la télévision, de leurs enregistrements, de leurs répartitions dans la journée.
une responsabilité sous haute surveillance, la révolte du public est prompte a se faire entendre.
il y a les polars.
il y a les jeux.
ils découpent la journée.
ils doivent être en français, ils doivent appartenir à leur monde, coincé entre napperons et caramels.
le petit salon, la cuisine tient dans une petite maison d'ouvrier grande comme une main.
Stains c'est l'envers de Neuilly, l'envers exactement
là les maisons sont justes utiles
les magasins justes économiques
dans sa petite maison elle a vu se transformer les champs en tour ,
les herbes folles en jardins publics,
il y a si longtemps,
mémoires du béton dont l'ombre mouvante découpe la ville.
elle regarde la rue par la fenêtre,
l'arthrose l'a paralyse.

elle observe les enfants joués,
elle se plaint un peu de la chaleur même si la météo l'avait prévenue,
elle a peur de la canicule,
Ce fut une sacré épreuve, une sacré pétoche.
cette année encore elle a rempli soigneusement le questionnaire de la maire.
Sur le mur de la cuisine sont inscrits, en gros les numéros d'urgences.
il y a aussi la photo du chien, celui qu'elle n'oubliera jamais.

c'est la fête de mère, donc.
nous sommes là avec nos petits cadeaux,
non! nous n'avons pas trop fait de dépenses!
pas trop fait de folies!
ici tout est raisonnable,
pas même la trace d'un jeu de grattage.
nous avons juste acheté le gâteau aussi,
sur sa demande,
la dernière fois, la pate des tartelettes étaient terriblement trop dur,
pour pas mal de dents.
nous avons raconter notre vie,
enfin les morceaux choisis.
nous avons montré des photos,
son fils à la mer,
son fils à la montagne,
raconter les bords de plages,
détailler les chemins de douaniers,
doucement la lumière de l'après midi traverse les rideaux.
les enfants continuent à se balancer,
une boite de biscuit à la main.
les femmes surveillent et discutent.

arrive l'heure de notre train de RER,
le père nous raccompagne,
grands enfants un peu curieux
nous sommes incapables de maitriser un véhicule.

vite,
vite, nous traversons la ville.
entre les panneaux de périphérique,
les arrêts de tramways,
les zones commerciales,
les camps,
les tentes sous les tunnels,
la poussière,
les sacs plastiques qui volent dans l'air,
vite.


passent des hommes en turbans,
des femmes en sari,
ils sont nombreux,
la bas,
dans un stade,
une femme indienne chante.

vite,
sur la route notre voiture passe,
notre voiture dépasse ,
la femme qui chante.

RER b,
nous rentrons,
les africaines en boubou,
les femmes aux voiles,
l'homme au chapelet,
un fleuve de sangs mêlés.

la bas,
la mère inquiète attends le retour de l'époux,
puis ce sera l'heure de Champs Elysées,
puis de manger,
l'heure du film.

enfin,
à la fin du jour,
bien fermer les volets et la porte,
tourner la clé,
et le verrou,
laisser le monde au monde,
l'inconnu aux inconnus,
les frontières invisibles.

puisque je vous le dit,
c'est une petite maison,
de celles faites en brique,
avec une allée de ciment,
et des œillets d'inde,
battis par des gens venus du nord,
au siècle dernier,
battis par des gens,
pour qui la route,
c'est un jour arrêter là,
et n'en croiserons jamais d'autres,
farouches et clos,
entre leurs murs.

joli, mignon, mais un peu petit peu trop long, ou trop lent dans l'écriture je pense.
Mais bien réaliste et bien pensé.

Un pet trop long à mon avis mais c'est assez bien écrit.