[Altéa] Court texte: "Naissance d'un monde"

Altéa

Dans les landes enneigées se murmure une légende, une légende plus ancienne que le monde, dit-on. Elle raconte qu'en des temps très anciens vivait un peuple différent du nôtre, capable de tous les miracles, excepté un : imaginer. Et par cela même, ils le sentaient au plus profond d’eux-mêmes, ils se mourraient aussi doucement qu’un crépuscule. Lorsqu’il ne resta plus qu’un seul d’entre eux, il est dit qu’il se nommait Ilit et qu’il partit chercher l’avenir ; incapable de rêves, incapable de toute pensée venue du néant, il courut ainsi, sans but ni chemin… mais il avait décidé de partir, et par cela même, de changer. Il marcha ainsi, des jours entiers, des nuits entières, obsédé par l’idée de trouver l’avenir, car s’il était impuissant à en imaginer ne serait-ce qu’un seul, il le souhaitait pourtant de tout son être. Sans s’en même rendre compte, il marcha ainsi des années, sans mourir, sans se nourrir, sans se retourner. Il ne voyait plus guère les pays qu’il traversait, n’entendait le silence ni même le hurlement des vents du nord, ne sentait pas plus le froid que la douceur du printemps. Il n’était plus qu’une ombre cherchant sa source. Un jour, pourtant, il s’arrêta. Quelque chose avait arrêté sa course, sa quête ; quelque chose l’avait réveillé de son long sommeil, ou plutôt : l’ombre venait de s’endormir, s’éveillant au rêve, après l’avoir appelé durant des années. Alors, il se trouva face à la seule créature vivante qu’il ait vu durant des années, elle souriait, espiègle et guère étonnée de le trouver là. Elle prononça quelques mots, simples, mais qui redonnèrent vie à Ilit.

- Qui es-tu ?

Il s’arrêta, leva les yeux et rencontra le visage d’une jeune fille, ni femme ni enfant, à cet âge où elles semblent venues des eaux pures, telles des nymphes.

Elle éclata de rire.

- la question est de savoir qui tu es toi, non ?

Et elle repartit en courant, entourée de sa robe qui tourbillonnait autour d’elle comme animée d’une vie propre, ses cheveux châtain offerts librement à la brise qui faisait chanter les clochettes qui y étaient mêlés. Elle était si belle, si vivante… mais lui, qu’était il ?

- Attends ! Attends-moi ! Cria-t-il. Je… tous les miens sont morts, pourquoi suis-je le seul à avoir survécu ?
- Tu ne le sais donc pas ? Fit-elle, étonnée. Regarde autour de toi. Regarde, et comprends !

Il n’entendit que sa voix, alors qu’elle disparaissait dans un filet de brume. Ce qui avait été les rivages d’un lac pur et sans fond, ce qui avait été les cimes enneigées et immaculées, ce qui avait été le plus merveilleux des crépuscules… tout cela venait de disparaître alors que doucement, il sentait la vie le quitter, retrouvant sur son visage ce qu’il avait si souvent vu sur celui de son peuple : le sommeil appelé par la mort, par l’oubli. Mais il ne le voulait pas, il avait enfin trouvé l’avenir en ce monde vivant, un monde capable de rire, de voler dans le vent, capable de le surprendre et de créer. Il s’accrocha de toute la force de sa volonté à l’image qu’il avait vue, cette vision que la mort ne pouvait vaincre, tentant désespérément de ne pas sombrer dans le sommeil. Il sentit son âme s’arracher à lui, il sombra en hurlant avant de trouver, tout au fond de lui, le néant. Dans les limbres de son être, dans un silence d’une solitude absolue, il prononça une pensée, unique, parfaite. Et au travers de ses larmes, il vit un soleil caresser les cimes enneigées qui bordaient un lac de cristal, un ciel étoilé et un vent caressant son visage, chaud, doux, asséchant des larmes qui coulaient de bonheur, de trop de beauté, d’amour. Des brumes, une jeune fille fut précédée du tintement de clochettes dorées, de son rire innocent, d’une promesse. Et elle fut là, devant lui, vêtue de voiles, sa peau dorée et ses yeux rieurs, verts comme l’eau du printemps, verts comme l’été.

- la réponse à ta question était simple… n’est-ce pas ? Tu as survécu parce que tu as accepté la mort comme un passage, et non une fin. Et par cela même, tu es devenu le passage et le passeur, et tu as créé ce monde par ton espoir. Chaque lac, chaque montagne, chaque clairière : tu n’en as vu aucune de pareille, mais toutes sont nées de la lumière que tu as laissée couler en toi, créant pour toi ce monde. Chaque pas t’a mené à lui. Il n’y d’origine qu’un rêve auquel tu as demandé de naître. Je suis la voix de l’univers, la voix de tous ceux qui ont un jour espéré. Je suis la Terre et à la fois, sa fille. As-tu un souhait, avant que ce monde soit offert ?
- Oui… je désire y vivre, ne serait-ce qu’une fois.

Elle rit doucement.

- tu y vivras des vies multiples. Ainsi que moi, car j’ai aussi rêvé ce monde… et je t’y ai rêvé tout comme tu m’attendais. Il nous faudra du temps, mais n’avons-nous pas l’éternité ?

Il s’avança, se voyant dans son regard, comprenant que ce monde était né d’eux et du rêve de l’univers… que malgré leurs corps si différents, ils n’avaient jamais été qu’un seul. Ils avaient attendu cet instant durant des millénaires. Elle, si dorée, fragile et fine, pouvant se mêler à la brume comme un souffle, et lui, ses cheveux argentés, ses yeux dorés, sa force capable de briser la roche…

- nous avons le présent… répondit-il, le soleil se couchant derrière lui, faisant briller sa longue chevelure argentée. La jeune fille le regardait, sa respiration tenue, fragile… elle avait attendu ce regard toute sa vie, ce visage si beau, si doux. Elle avait tant envie de pleurer, de livrer cette émotion trop grande, mais elle ne le pouvait.

Elle ne recula pas face à ses mains qui doucement se tendaient vers son visage, elle attendait, silencieuse, craintive… puis, elle sentit ses doigts, leur force, la certitude que plus jamais, ils ne s’éloigneraient d’elle. Leurs lèvres se fondirent, leurs mains se connurent. Sous le crépuscule d’Altéa, ils se donnèrent leur vie et y connurent le passage qui les encrerait à ce monde. Leurs corps disparurent dans les derniers éclats du soleil, se parsemant en milles étoiles. Et ils revinrent, éternellement, tels que nous. A chaque ère, ils se montrent à nous, appelés par Altéa, leur mère, leur rêve. Simples mortels, ils deviennent les veilleurs, se dressant face au chaos, se dressant seuls, ne s’ayant que l’un l’autre pour trouver l’avenir. Je crois qu’ils ont un espoir… que nous leur donnions un monde où vivre, car ce monde est né de leur amour, et il est temps que nous leur rendions cela.

Quelles que soient les légendes… c’est dans leur regard qu’elles sont nées.

I.

Très beau texte. Poétique,fort en émotion,belles descriptions ...

Par contre,j'ai eu un peu de mal avec ce passage : "il sentait la vie le quitter, retrouvant sur son visage ce qu’il avait si souvent vu… le sommeil appelé par la mort, par… l’oubli. Mais il ne le voulait pas, il avait enfin trouvé l’avenir, un monde vivant, ca-pable de rire, de voler dans le vent, capable de le surprendre. Il s’accrocha de toute la force de sa volonté à l’image qu’il avait vue, tentant désespérément de ne pas sombrer dans le sommeil. Il se sentit s’arracher à lui, puis sombrer en hurlant avant de trouver, tout au fond de lui, le néant."
j'ai du le relire deux trois fois avant de vraiment comprendre, et encore, quand j'ai eu lu la suite.

Et puis,sinon,tu as tendance à mettre des "-" un peu à tout bout de champ ^^ du genre "ca-pable", "en-fant" je crois, et tant d'autres. problèmes de clavier ? ^^

Et zut... Les - viennent du copier coller Word: je sais pas comment faire pour que cela cesse!

J'ai modifié le passage, et enlevé les - intempestifs.

Merci pour ton commentaires, c'est vrai que c'était un peu... étrange.

Effectivement, trés poètique tout cela. Des images fortes et efficaces. Tu as un style d'écriture trés fluide, ce qui à mon sens est parfait dans ce genre de récit.

Par contre, et là, c'est un gout tout à fait personnel, j'accroche pas à ce genre de texte. Trop poétique pour moi (ou trop intelligent peut être pour ma petite cervelle). J'ai toujours l'impression qu'il y a un message caché que je n'ai pas saisi.

Quoiqu'il en soit beau travail tout de même.

Merci à toi pour ton commentaire. Je suis en train de terminer l'intro d'un de mes deux romans en route (pas malin, mais pas le choix). C'est moins poétique^^. Je le mettrai dès que paufiné!

Et t'inquiète, pas de messages cachés... j'adore les mystères, c'est tout^^.

Alors....
J'avoue que c'est un texte sublime (je rejoins donc les autres sur ce point), avec de telles belles images et une belle façon d'écrire. Tu as du style et un vocabulaire assez riche.

Par contre, sur le fond, ben.... j'ai presque rien compris... Je sens qu'il y a peut-être un message à saisir mais franchement, j'ai eu beau le relire, j'ai toujours pas compris... Alors peut-être qu'en lisant la suite, je comprendrais mieux mais là..... ^^

Toutes mes excuses pour le côté un peu... obscur! En fait, cela s'inscrit dans la perspective de mon roman...

POur me faire pardonner, je vous poste une petite nouvelle... Bref, qqch de plus "réel".

Merci beaucoup pour vos avis, je vais en prendre acte pour mes autres textes à venir!

J'ai un peu de mal avec ton postulat de départ.
Un peuple incapable d'imaginer.. Pour moi, c'est impossible. Et même si c'était concevable, comment un individu privé d'imagination pourrait-il comprendre qu'avec sa disparition, c'est son peuple qui disparait définitivement? S'il n'a pas d'imagination, il ne peut pas anticiper cela.

Sinon, aspect purement technique : pour les tirets de césure dans ton document. Il suffit de modifier les options dans ton document word.
Va dans le menu : Format >> paragraphe >> selectionne l'onglet "enchainement" puis coche la case "ne pas couper les mots".

MERCI infiniment pour le problème technique...

Pour le postulat, seul un parmi tout un peuple a été capable de comprendre, non, de ressentir la possibilité d'une autre vision du monde... et c'est cela qui l'a sauvé. Mais je conçois que cette idée soit un peu étrange.

Merci pour ton commentaire et pour ton aide

Je renchéris : un peuple incapable d'imaginer... Mais, nous sommes en fantasy, non? et, comme tu le précise, ce peuple par là-même condamné à disparaître (finalement, ça ne me semble pas "inimaginable" ^^).
C'est vraiment prenant comme texte, bien écrit, intrigant, enchanteur... Aussi savoureux qu'un carreau de choco à la fleur de sel (mon préféré...).
Mais parfois, tu as des expressions confondantes... quant ton personnage marche longtemps, sans mourir, tu veut dire sans vieillir? Ou sans faiblir? Parce que, bien qu'on sache toujours pas ce qui se passe après, je suppose que quand on est mort, je suppose qu' on ne marche plus( dans tous les sens du terme).
Enfin, des détails, des détails, ça m'a tellement plu que je me sentirais mal de chipoter plus avant^^.

Merci pour le commentaire

Lorsque je dis qu'il ne meurt pas malgré les années, c'est une manière de dire qu'il a trouvé la solution, celle qui permet de vivre, de surmonter la mort en tant que fin. en tant que tel, il possède le pouvoir ultime, celui qui naît de l'imagination et qui n'a aucune limite.

Dans mes nouvelles, j'avoue que je me lâche. A la base, j'ai toujours écris pour moi seule, et c'est depuis que je suis sur le net que je fais lire mes textes. Il faut que j'adapte ma plume au regard des autres, maintenant. Ce qui dans mon cas passera par une clarification. J'aime les symboles et le mystère, les images et leur force. Je pense que si je devais décrire ma plume, je souhaiterai qu'elle soit un pinceau^^.

Tous vos commentaires sont donc très précieux, car je vois par vous comment sont mes textes. Jamais je n'aurais imaginé qu'ils plaisent! C'est une agréable surprise, qui me fait envie de continuer à apprendre à la partager en les rendant... plus humains?

Euh, le problème c'est pas qu'il ne meurt pas...( J'ai bien compris pourquoi il réussit à surmonter la fin, en imaginant ce qu'il y a après.) C'est que tu précise qu'il marche sans mourir (dans ton premier paragraphe).... Et qu'à mon sens, les deux sont de toutes manières incompatibles.
Mais ils sont humains, tes textes! Plus accessibles peut-être (quoique, personnellement, ça ne m'a pas semblé obscur... On voit que ça appelle une suite et des éclaicissements, c'est tout.).
C'est bien, attitude très positive! Admettre les critiques, c'est amorcer le progrès! ^^