pour ma demi page de la semaine, une petite scène de l'épisode 2, mais que j'ai écris en avance. Je n'aime pas poster sans respecter l'ordre chronologique, mais des fois quand une scène s'impose, je ne peux rien faire d'autre tant que je ne l'ai pas posée...
La nuit était très calme. Pas un souffle de vent ; la mer était lisse comme de l’huile. Les seuls sons audibles étaient les crissements légers de quelques cigales, et les crépitements du bois dans le feu. Erishun, allongée dans l’herbe, goûtait cette tranquillité avec ravissement. Le ciel dégagé, piqueté de milliers d’étoiles, l’odeur légère de la fumée, la douceur de l’air.... Un mouvement à la limite de son champ de vision la ramena soudain à la réalité. Fao tisonnait le feu. Elle en profita pour le regarder. Il aurait été très séduisant, sans cette lueur glacée dans son regard.
Comme s’il avait senti son examen, il releva la tête.
“Comment as-tu eu cette cicatrice ?” demanda t-elle à brûle-pourpoint.
Il la dévisagea, l’air surpris et méfiant à la fois.
“Ce n’est pas parce que nous devons travailler ensemble que nous devons faire la conversation, rétorqua t-il brusquement.
-Oh, ça va, ce n’est pas grave, convint-elle en haussant les épaules. Puisque nous sommes coincés ici toute la nuit, autant passer le temps agréablement, mais c’est comme tu veux.”
Elle se rallongea en lui tournant le dos.
“Je ne vois pas en quoi la question t’intéresse, de toute façon.” ajouta t-il après quelques secondes de silence, avec toujours une note méfiante dans la voix.
Erishun sourit pour elle-même dans l’ombre. Les hommes étaient si faciles à manipuler... Elle lui répondit sans se retourner, feignant l’indifférence.
“J’étais seulement curieuse parce que, comme tu as dû le remarquer, j’ai presque la même. Mais après tout, tu as raison, nous ne nous reverrons sans doute jamais après ça, inutile de se raconter nos vies.”
Un long moment passa. Elle pouvait sentir sa perplexité dans son dos. Il devait la regarder avec son air tracassé habituel, un sourcil haussé. Elle s’appliqua à respirer souplement, comme si elle s’était assoupie. Lorsqu’il se mit à parler, elle retint un éclat de rire. Sa voix était lointaine, comme celle de quelqu’un qui se remémore un souvenir, et elle n’était même pas sûre qu’il s’adressât réellement à elle.
“ C’était pendant mon apprentissage. Une erreur de débutant. L’homme que je devais assassiner faisait seulement semblant de dormir, et quand je me suis penché sur lui pour le poignarder, il s’est redressé et m’a attaqué. J’ai juste eu le réflexe de reculer et il n’a fait que m’entailler la joue. Je l’ai tué, finalement, j’ai accompli ma mission, mais cette cicatrice est restée comme une leçon que je n’oublierais pas. Je n’ai plus jamais refait cette erreur ensuite.”
Elle roula sur le dos, tentant d’imaginer la scène.
“Et toi ? demanda t-il brusquement. D’où vient ta cicatrice ?
Elle le regarda, surprise.
“Je croyais que ça ne t’intéressais pas.
— Tu n’es pas la seule à avoir remarqué qu’elles sont presque identiques, ricana t-il. Et puisque j’ai répondu à ta question, j’estime que tu peux répondre à la mienne.” expliqua t-il avec presque l’air de regretter de l’avoir fait.
Elle passa un doigt sur sa joue, prenant une expression désabusée, comme si cela n’avait aucune importance.
“Quand j’ai eu environ quatorze ans, le sorcier que je servais est venu dans ma chambre une nuit et a essayé de me violer. Je me suis défendue et dans la bagarre la lampe à huile est tombée et s’est cassée. Comme j’avais le dessus, il s’est servi d’un tesson comme arme. Je ne sais plus ce qui s’est passé ensuite, mais quand j’ai repris mes esprits, le sorcier était mort et je me suis enfuie.”