Aujourd’hui, j’ai raconté ma vie. Pour la première fois. Je me suis assis sur un banc et j’ai parlé, parlé alors que passait le temps. Combien de temps ? Je ne sais pas. Mais j’ai beaucoup parlé. Le temps d’une guerre, le temps d’un rayon de soleil, d’une vie ou d’une poussière. Peu importe, n’est-ce pas ?
J’ai tout déballé. Tout raconté. Mes joies, mes peines et mes envies. Je ne l’avais jamais fais auparavant… parler comme ça. C’est pas vraiment mon truc. Moi je ne dis rien sur moi. Et là je me suis ouvert. Comme on ouvre un livre. J’étais le livre et mes paroles étaient les mots.
Je n’ai rien omis. Et vous savez quoi ? ça soulage bougrement ! Parler de soi, dans le fond, ça fait du bien. On me l’avait toujours dis et je ne l’avais jamais cru. Mais c’est vrai. Ça fait du bien. Ça vide, comme on dit. Et c’est agréable. On se sent écouté. Et l’on devient, l’espace de quelques instants, le centre de l’attention. J’ai eu peur de trop en dire, au début. Je savais que je devais garder une part d’ombre, une part de secret. Mais non. Dans un élan vague, j’ai tout dit. Je suis malade, et je l’ai dit. Je suis pauvre, et je l’ai dit. Je suis amoureux, je l’ai dit aussi. Tout est dit, je n’ai plus rien à cacher. Si j’étais mort, je l’aurais dit aussi. Mais je ne suis pas mort. Pas encore.
Sinon je l’aurais dit.
Voilà. Moi je suis si heureux d’avoir parlé, d’avoir tout déballé. Je me sens bien je crois. Je crois même me sentir mieux. Assis sur ce banc, le regard perdu, j’ai parlé, et parlé encore.
Ce soir, après avoir tant parlé, je vais aller me coucher. Ce fût une belle journée. Un pâle soleil couvrait mes paroles. Un vent froid me baignait de sa robe de glace.
Sur ce banc, j’ai tant parlé. Tout dit. S’il y avait eu quelqu’un, il aurait su tous mes secrets.
Mais le banc était vide.
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C'est un crapaud je vous dis, un crapaud ! Pas une grenouille.