Mille et une vérités (Définitif ^^)

6 Décembre de l’année 1249 Ap.O

L’homme courrait à en perdre haleine, terrorisé. Ses pas s’enfonçaient profondément dans la neige ; les branches lui fouettaient le visage et son souffle l’auréolait de vapeur blanche. Son épée aux reflets sanglants brillait à la lueur de la lune dont quelques rais parvenaient à franchir l’épaisse frondaison.

Soudain, un hurlement sinistre retentit derrière lui et un frisson lui parcourut l’échine. Des larmes de peur coulèrent le long de ses joues avant de se cristalliser dans sa barbe. Il était épuisé et sa monture était déjà morte de fatigue depuis plusieurs heures. A ce rythme, il sentait bien qu’il ne tarderait pas à en faire de même ; S’il n’était pas dévoré avant.

Les hurlements se firent plus nombreux et plus rapprochés. L’homme pouvait presque entendre la neige crisser sous les pattes des loups qui lui donnaient la chasse.

— Une torche, souffla-t-il entre deux respirations, mon âme pour une torche !

Mais nul n’entendit sa supplique, et à présent, il avait l’impression de sentir leur souffle sur sa nuque. Apercevant un énorme chêne, il lâcha son épée et sauta aussi haut qu’il le put ; ses mains se refermèrent sur une branche chargée de neige, mais il tint bon et parvint à se hisser de justesse ; une mâchoire claqua juste sous son pied. Il n’osa pas regarder en dessous et continua son ascension.

Une fois qu’il se sentit suffisamment en sécurité, il jeta un rapide coup d’œil en bas : une masse compacte de loups, assis au pied de l’arbre et les yeux luisant, attendait patiemment qu’il se fatigue. L’homme poussa un gémissement désespéré et, se rapprochant du tronc, l’enserra de ses deux bras. Puis il posa le front sur le bois gelé et laissa libre court à sa détresse. Après tout, s’il mourrait ici, qui se soucierait de dire qu’il avait pleuré ?

Le temps passa, les minutes firent place aux heures et le fuyard pouvait sentir ses muscles se contracter et s’ankyloser sous les effets du froid ; et les loups ne semblaient pas décidés à vouloir lever le camp.

— Si seulement j’avais gardé mon épée, j’aurais pu en tuer deux ou trois.

Finalement cette attente eu raison de lui, personne n’avait connaissance de sa venue, aucun secours n’était à espérer. Et, à choisir entre finir comme un gland qui tombe une fois mûr ou mourir l’arme à la main, il préféra la seconde option. Il se décolla de l’arbre, remua péniblement ses membres engourdis et entama la descente. Les bêtes qui l’attendaient se mirent alors en mouvement en grondant d’impatience.

Une fois sur la dernière branche, l’homme s'accroupit, retira sa cape qu’il enroula autour de son avant bras comme un bouclier, puis dégaina le poignard qu’il avait à la ceinture. Il toisa un temps ses ennemis qui trépignaient en contrebas, et songea avec amertume qu’il avait échoué. Ses camarades étaient morts. Et personne ne saurait jamais pourquoi, puisqu’il allait mourir ici.

— Pardonnez-moi, murmura-t-il

Il prit une dernière inspiration… et sauta.