Atelier d'écriture
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Atelier d'écriture

Communauté d'écrivains en herbe
 
AccueilRechercherS'enregistrerDernières imagesConnexion
Le Deal du moment : -39%
Ordinateur portable ASUS Chromebook Vibe CX34 Flip
Voir le deal
399 €

 

 Dans le noir

Aller en bas 
AuteurMessage
HarleyAWarren
Hey, soyez cool, je viens de m'inscrire !
HarleyAWarren


Nombre de messages : 5
Date d'inscription : 05/01/2022

Dans le noir Empty
MessageSujet: Dans le noir   Dans le noir Icon_minitimeMer 19 Jan 2022 - 10:04

Le petit extrait qui va suivre est tiré d'une romance historique se déroulant au Japon vers 1185. Il s'agit d'une scène de sexe entre deux adolescents disciples d'une école de sabre. Petits yeux s'abstenir, donc

Dans le noir

Il me fait basculer sur le dos et, avant que j’ai eu le temps de réagir, s’allonge sur moi, son sexe pressé contre le mien. Il les prend tous les deux dans sa main et commence des va-et-vient. Les mains crispées dans son dos et les jambes enroulées autour de lui, je fais de mon mieux pour garder le silence, même si j’ai l’impression que chacun de mes soupirs s’entend jusqu’à l’autre bout de la koryū, que chacun de ses « T’es à moi » est hurlé alors qu’il ne fait que chuchoter.

Couché ainsi, je redécouvre son corps comme je n’en avais fait l’expérience. Je l’ai vu nu des dizaines, voire des centaines de fois. Je l’ai frappé, empoigné, maintenu entre moi et le sol, lors de nos entraînements ou de nos bagarres, rien de son corps ne m’est inconnu. Mais ici, dans le noir, rien n’est plus pareil. Les bleus sur ses bras et ses jambes, dont je connais pourtant par cœur l’emplacement, ont été avalés par les ténèbres. Seules restent sa lèvre gonflée, qui se presse sur les miennes, et cette cicatrice trop pâle pour être visible mais dont je sens la boursouflure sous mes doigts. Quand je passe ma langue dans son cou, elle se couvre de sel, le même que celui des doigts de Ryuichi.

Je ne passe certes pas mon temps à lécher les gens, mais je me dis que ce goût-là est celui des adultes, celui des hommes. Je ne peux pas m’empêcher de constater, un peu amer, que Toshiko est bien plus avancé sur cette voie-là que moi. C’est normal, puisqu’il est plus âgé, mais il y a une différence entre le savoir et le constater. Étourdi par le plaisir qui m’intoxique, je me laisse happer par la toison sous ses aisselles. Les miennes sont encore glabres, comme tout le reste de mon corps — même mes mollets ne sont couverts que de duvet. On prétend qu’il n’y a rien de plus beau que les garçons comme moi, mais je ne suis pas d’accord. Bien sûr, je trouve les femmes jolies et les jeunes garçons ont aussi leurs charmes, mais j’aime bien mieux les hommes plus masculins, leurs muscles, leurs poils, leur voix grave et leurs grandes mains. Peut-être est-ce juste parce que je suis jeune et que cela changera quand je grandirai, qui sait ? Fasciné, je glisse mes doigts aux aisselles de Toshiko et m’amuse de cette sensation étrange.

— Qu’est-ce que tu fabriques ? Ça chatouille !

Je devine au ton de sa voix que je n’étais pas censé faire une chose pareille. Je retire ma main, bafouillant quelques pitoyables excuses :

— Rien, rien, c’est juste qu’on voit rien, je me perds.

Il rit doucement et guide ma main jusqu’à son visage, où il glisse mon pouce à l’intérieur de sa bouche. Les yeux fermés, je tâche de lâcher prise et me laisse guider. Je me visualise son corps comme une vague qui s’écrase contre moi, encore et encore. Et soudain, un éclat blanc envahit mon champ de vision, je me sens léger, comme libéré. Quand je reprends mes esprits, un liquide poisseux s’étale sur mon ventre. Après un ultime coup de reins, Toshiko s’immobilise lui aussi. Quelques gouttes, aussi brûlantes que je le suis, viennent me consteller le torse.

Il se laisse tomber à côté de moi et nous reprenons notre souffle tous les deux. Une odeur étrange a envahi l’air, à la fois âcre et suave. Du bout des doigts, il effleure les cheveux sur mon front. Il déglutit.

— C’était… bien, dit-il avec un rire nerveux. Est-ce que ça t’a plu ?
— Ouais, c’était chouette.

Si je le pouvais sans réveiller tout le monde, je me mettrais une baffe. Chouette ? Quelle réponse nulle. La question aussi était nulle, cela dit. Cela dit, Toshiko semble satisfait. Il m’embrasse sur la joue.

— Dès qu’on se sera débarrassés de ce Yosa, on ira dans ma cachette et on fera tellement plus que ça.

Ça… ça… le terme résonne dans ma tête. On vient de faire ça en plein milieu du dortoir. Maintenant que la fièvre du moment est redescendue, je me rends pleinement compte de ce que nous venons de faire et dire que je me sens mortifié serait l’euphémisme du siècle. C’est à peine si j’ose sortir la tête de sous la couverture, alors que j’étouffe. J’entends toujours le ronflement de Jishin. Heureusement, il ne s’est pas réveillé. Nous ne faisions peut-être pas tant de bruit que cela, alors. C’est même possible qu’il nous ait couverts.

Toshiko fouille sous son oreiller et en sort quelque chose que je n’identifie que lorsqu’il me le glisse dans les mains avec un discret : « Tiens, pour t’essuyer ». Du papier de soie. Qu’est-ce qu’il fait avec ça sous son oreiller ?

— Tu avais tout prévu ?
— J’en garde toujours sous mon oreiller. Tu sais, au cas où.
— Ah, parce que tu as l’habitude de te tripoter dans le dortoir, en plus…

Toshiko hausse les épaules.

— J’irais pas jusqu’à dire l’habitude, mais ça m’arrive, quand j’ai la flemme de sortir trouver un coin tranquille.
— Mais t’es un gros dégueulasse !

Même si je chuchote toujours, j’ai élevé la voix plus que je ne l’aurais voulu. Jishin s’arrête de ronfler pendant quelques instants, mais reprend ensuite de plus belle.

— Tout le monde fait ça, c’est toi qui es chelou.

Une fois que j’ai terminé de me nettoyer, il récupère le papier et me serre contre lui. Je sais que je vais devoir regagner ma propre couche à un moment ou à un autre, mais je voudrais rester contre lui toute la nuit. Le tournoi du festival d’été arrive à grands pas, et avec lui tant de changements. Je n’ai jamais eu autant l’impression de me pencher au bord du précipice. Je voudrais profiter de chacune de ses dernières secondes d’insouciance auprès de Toshiko.

Il doit sentir mon hésitation car, en m’embrassant le front, il me murmure :

— Les autres ne sont pas près de revenir de leur tour de garde, reste encore un peu.

Je repose ma tête à côté de la sienne. Il a raison : je peux bien me permettre de rester encore quelques instants de plus.
Revenir en haut Aller en bas
 
Dans le noir
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Dans le noir
» SEUL DANS LE NOIR (PAUL AUSTER)
» Amour noir
» En Rouge et Noir
» Le rouge et le noir

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Atelier d'écriture :: Lorsqu'écrire devient aussi impérieux que respirer - Atelier d'écriture :: Les Galeries :: Récits contemporains/polars :: textes contemporains/polars-
Sauter vers: