Comment annoncer à un parent là mort de son enfant?

Le titre parle de lui même, mais mérite une petite explication.
Aujourd'hui j'ai du annoncer à des parents le suicide de leur enfant. Ce n'est pas la première fois que ce genre de situation m'arrive et je ne sais jamais comment annoncer la chose.

J'ai toujours l'impression que quoique je dise, je serais toujours maladroit. J'imagine qu'il n'y pas de bonnes manières et que tout dépend de la personne que l'on a en face de soit, mais je me dis que peut être il y a des phrases ou un comportement qui sont plus appropriés.

Je n'ai pas de mal à trouver les mots pour réconforter les parents et les accompagner (le temps de leur audition, je sais s'est terrible de lire cela), dans leur douleur. Je dirais que je fais même ça assez aisement.

Ce qui me gêne vraiment c'est cette annonce. Cette phase de "présentation".

Pour la petite histoire, quand j'ai commencé dans la police (j'ai fait mon service militaire dans cette joyeuse administration) j'ai été choqué par le comportement d'un vieux fonctionnaire. Un jeune était mort d'un accident de la route, et il avait fallu aviser les parents.
Le brave fonctionnaire que j'accompagnais, n'avait rien trouvé de mieux que cette phrase qui reste gravée à toujours dans ma mémoire.

-"Bonjour madame Police Nationale, je viens vous dire que votre gamin est mort dans un accident de voiture". Le tout fait sur un seuil de porte.
Je vous assure que c'est mot pour mot ce que cet abruti a prononcé.

Je me suis juré à ce moment là, que si je devenais policier à mon tour, je ne reproduirais jamais ce que j'avais vu.

Donc voilà. Ce petit discours terminé (excusez moi de m'être quelques peu égaré) je vous demande en fait, si vous voyez une approche plus humaine pour annoncer à un parent que son enfant a été retrouvé mort.

Je ne pense pas qu'il existe vraiment de phrases pour annoncer ça plus humainement, que ce soit pour un enfant ou pour toute personne proche. un drame pareil touche toujours profondément, et il faut du temps pour l'accepter, faire son deuil et que la douleur s'atténue.
Beaucoup de monde doit penser comme toi Sombretoile et je t'admire d'avoir le courage d'aller annoncer ça. Je crois que je ne pourrais pas ... Je ne me sentirais pas à ma place.
Cela dit, en effet,la façon dont ton policier l'a annoncé n'est pas vraiment la chose à faire ...

Voyez... moi je me dis que flic c'est vraiment un métier de m***e. Juste pour ce genre de trucs.

Voilà ma pensée philosophique du jour.

Je n'en ai aucune idée. J'ai eu la chance de ne jamais fréquenter la mort de près, et je ne sais absolument pas quel comportement j'adopterais.

Personnellement, je suis contre la "préparation du terrain". J'entends par là : phrases détournées, air grave, yeux baissés, mais on reste dans le flou un moment, on tourne autour du pot pour éviter de frapper de plein fouet. Dans tous les films (veuillez m'excuser, mais c'est ma seule référence ! je suis chanceux), je trouve cette "préparation" insupportable. Cela fait monter le stress, on sent qu'il y a quelque chose de grave, on se met à redouter le pire, et quand le pire arrive, finalement, on n'est pas mieux préparé.
Je pense donc qu'il faut y aller tout de suite. "Madame, Monsieur, j'ai le regret de vous annoncer que votre enfant a fait une tentative de suicide et qu'il est décédé."

Quant au comportement, bien évidemment, on évitera les éclats de rire ou les plaisanteries ; on évitera également l'abandon immédiat (hop, j'annonce la nouvelle et je m'éclipse).

Les "bonnes conditions" pour moi seraient que les parents soient assis en face de moi. Et je leur dirai cash que leur enfant est mort, et que je suis désolé.

Je ne crois pas qu'il y ait des mots magiques ou puissants pour réconforter. Tu es quelqu'un d'étranger à la famille, Sombretoile ; même le fait que tu sois désolé ne touche pas les parents (en revanche, si tu le leur annonces comme si tu t'en fichais, ils en seront un peu outrés, je suppose). Autrement dit, je doute que ta compassion apporte un quelconque réconfort. En revanche, et ce n'est pas négligeable, elle n'apporte pas d'inconfort supplémentaire, ce qui est déjà un grand bon point.

Là où la compassion peut toucher, c'est quand le parent est seul à élever l'enfant. Dans ce cas, je pense que la compassion est obligatoire. Le parent, qui a soit perdu sa compagne / son compagnon, soit s'est faché avec lui / elle, a certainement beaucoup investi dans cet enfant, et il s'est investi seul, donc la perte est d'autant plus douloureuse qu'il la vit tout seul. Je présume donc qu'une main réconfortante est vraiment bienvenue.

Toutefois, je suppose que ce qui peut aider les parents, ce sont les détails. Dans quelles circonstances la chose s'est-elle produite ? Qu'a fait leur enfant durant les derniers instants de sa vie auxquels ils n'ont pas pu assister ? Tout ce que tu leur raconteras à ce sujet, selon moi, les aidera beaucoup à mieux accepter, à mieux comprendre la mort de leur enfant. Quand c'est le cas, tu dois souligner impérativement que l'enfant n'a pas souffert. Ca aussi, ça soulage.

Voilà. Je ne suis pas spécialement psychologue, alors peut-être que je me trompe complètement. Pour résumer, je pense que ta compassion ne touche pas, mais l'absence de compassion oui, et que les mots réconfortants sont seulement les mots qui expliqueront du mieux qu'ils peuvent comment le drame s'est passé. Car tu es la dernière personne à avoir eu des nouvelles de l'enfant chéri de ses parents, et ces nouvelles seront les paroles les plus importantes que tu pourras prononcer.

Iron a écrit:

Voyez... moi je me dis que flic c'est vraiment un métier de m***e. Juste pour ce genre de trucs.

Non flic est un merveilleux métier, à condition de le faire humainement.

Hakkrat. Je ne suis pas vraiment d'accord avec toi quant à la compassion.
Je ne dis pas que je vais soulager qui que ce soit, par de jolies phrases. Mais les gens qui souffrent, réclament énormément de compassion.

Tu ne peux pas imaginer les confidences que tu reçois dans ces moments là. Tu devrais voir quel effet peut faire une pensée sincère, un conseil donné, un réconfort apporté. Il y a même des personnes qui écrivent pour te remercier par la suite.

Je sais que cela peut paraitre bizzare, mais les gens ont besoin de ces paroles. Qu'on leur dise que si leur enfant est mort, cela n'est pas de leur faute. Ils ont besoin qu'on leur dise que l'avenir ne sera pas rose, qu'ils n'oublieront jamais leur enfant et qu'ils vont devoir vivre avec ce drame...

Bref, ils ont besoin qu'on soit à leur écoute.
Alors ok, ils veulent aussi savoir ce qui est arrivé à leur enfant, sur le pourquoi, le comment. Mais je dirais c'est presque secondaire.

Par contre là où je te rejoins complétement: ne pas tourner autour du pot.

Merci à vous de tenter de m'aiguillier un peu.

Bon, sans te vexer, tu sembles avoir déjà une bonne idée sur la question.

Je me suis donc trompé. ::rolling::
(Heureusement, tout le monde remarquera mes "je suppose", "je pense", "je présume", "à mon avis", qui dénotent une certaine incertitude quant à la véracité de mes propos... )

Disons que comme référentiel, j'ai pris... moi. Je pense (tiens, encore un !) que si mon enfant (que je n'aurai sans doute jamais, mais bon, on reste dans le domaine des hypothèses de toute manière) venait à mourir un jour, je me ficherai un peu de la compassion du policier en face de moi. Je préfèrerais être seul avec mon compagnon et mes autres enfants (l'hypothèse devient de plus en plus improbable) pour faire mon deuil.

Mais là encore, je me trompe peut-être complètement, et qui sait si j'apprécierais beaucoup plus cette compassion offerte.

on se met à redouter le pire, et quand le pire arrive, finalement, on n'est pas mieux préparé."

Ce moment est peut-être un moment préparartoire pour faire comprendre à l'autre que la situation est grave et qu'il doit se préparer à l'annonce.
En tant que sage-femme j'ai du annoncer la mort d'enfant à naître ou déjà né. La naissance comme l'accident n'est pas un moment oû est prêt à entendre ce genre de discours. Ce petit moment que tu trouves insupportable est souhaitable pour que la personne en face de toi se "synthonise" avec les émotions du moment.
Le plus important c'est l'écoute bien sûr. L'élaboration de l'événement parfois plusieurs jours plus tard. Le plus souvent les personnes ont besoin de comprendre. Avec le suicide la culpabilité parentale est très forte. Il me semble important de verbaliser cela ainsi que le sentiment d'injustice. Peut-être adrésser les parents à une association. Je ne dirais pas suicide dans l'annonce.
le plus important c'est d'être soi-même très clair avec ses sentiments pour ne pas ajouter ce fardeau aux parents.

J'ai entendu des trucs horribles moi aussi. Je me rapelle un père dire à sa femme qui a perdu l'enfant "si j'avais su que tu le perdrais je ne t'aurais pas épousé."

Généralement, quand il y a un mort, une réaction naturelle est de chercher un coupable pour déverser sa colère. Si un père est séparé de la mère, il aura tendance à s'en prendre à elle et à la dénoncer comme responsable...

Sinon, moi aussi, je trouve que policier et médecin (ou infirmière ! ) sont de très beaux métiers. Il faut juste avoir des nerfs d'acier et un certain recul. Moi, je n'en ai pas (dans le sens où je fais preuve de beaucoup trop d'empathie), et j'admire les gens de ces professions (mais des nerfs d'acier, il va m'en falloir en tant que prof XD)
Je suppose qu'Iron a dit que c'étaient des métiers de m***e dans le sens où ce sont des métiers pas du tout faciles...

Les sage-femmes font parti du personnel médical et pas para-médical comme les infermières. Les infermières ne font pas d'annonce mais elles s'occupent des morts ce qui est aussi difficile.

J'ai bien entendu une idée sur la question, mais je voulais savoir s'il y avait mieux à faire.
Le vrai problème que je posais en fait, et l'annonce de la mort.

Pour ce qui est de la compassion, àprés mures réfélexions, je pense que tu as raison finalement, les gens s'en fichent pas mal. Ce qu'ils veulent c'est avant tout une écoute.
Compassion n'est peut être pas le mot approprié.

Pour le métier de policier, là c'est tout un débat. Va falloir que je réfléchisse à lancer un sujet la dessus tiens!

evahe a écrit:

Les sage-femmes font parti du personnel médical et pas para-médical comme les infermières.

:silent:

Au temps pour moi.

J'ai un grand ami, ou plutot un adulte avec qui j'ai eu la euh ... chance/malchance de parler.

Il travail à la morgue.
Pour ce qui va suivre je vait surement m'éloigner un peu du sujet mais ne vous inquitez pas j'y reviendrait.

Il travail donc à la morgue. J'ai depuis mon plus jeune age une etrange attirance pour la mort, pas au sens où on l'entend, c'est juste un sorte de fascination, de nombreuse interrogations à l'origine de pas mal de prise de conscience. Pour des raisons un peu longues qui n'interressent surement personne je me suis retrouvée un jour à la morgue, et il y avait cet homme.
Je lui est tout d'abord demandé de me parler de son metier, alors il m'a raconter qu'avant de travailler à la morgue il était le flic chargé d'annoncer la mort d'une personne à sa famille.
Je m souvient plus ou moins de ses paroles lorsqu'il m'a raconté la toute première fois:

"C'etait des gens asser pauvre, quand j'ai sonné c'est la femme qui m'a ouvert, elle portait un bébé dans ses bras et elle tenat un petit garçon part la main. Derrière elle je voyait une table et 3 autres enfants étaient la.
Alors j'ai dit: "Bonjour madame, Police. j'ai une très grave nouvelle à vous annoncer."

Mon bonhomme de la morgue m'a raconté que la femme a pas bougée, elle a pas eu l'air de s'inquiter le moin du monde.
Au bout d'un petit moment elle a dit "C'est a propos d'un des gamins ? qu'est-ce qu'il a encore fait ?"
Mon ami a repondu:*"J'ai bien peur que oui madame. On a retrouvé votre enfant en bas d'une chaussée, il avait beaucoup d'alcool dans le sang, nous sommes presque sur qu'il a perdu le controle de sa voiture... Je suis désolé"
Encore une fois la femme n'a pas bougée, elle a juste dit "Fallait pas vous déplacer pour ça, il voulait se tuer de toute façon" puis elle a fermée la porte.

Mon ami de la morgue m'a dit qu'il en avait vu pas mal des gens comme ça, il y en avait des normaux mai un jour il accompagnait un autre policier, et celui-ci a dit une phrase un peu comme celle de Sombetoile -"Bonjour madame Police Nationale, je viens vous dire que votre gamin est mort dans un accident de voiture".

A partir de ce moment la il a quitté la police et il travail à la morgue parce que selon lui "Je préfère affronter la mort plutot que ceux qui en souffre."

Il n'y a pas de bonne façon d'annoncer la mort, elle fait mal de toute façon. Et Sombretoile, quoi qu'il arrive tu ne peux rien faire de plus que de leur annoncer avec un peu de ta compassion.